La
p�dagogie actionnelle (Overmann, 2012) |
La p�dagogie de projet | La p�dagogie de la t�che |
La m�thode /
l'approche
traditionnelle |
naturelle |
directe |
active |
audio-orale | audio-visuelle |
communicative (1) (2) |
Diverses conceptions de l'einseingement-apprentissage | Constructivisme et socio-constructivisme |
1.
La m�thodologie traditionnelle.
La m�thodologie
traditionnelle est �galement appel�e m�thodologie classique ou
m�thodologie
grammaire-traduction. Elle �tait utilis�e en milieu scolaire pour
l’enseignement du latin et du grec. Puis elle a constitu� une m�thode
d’apprentissage des langues modernes qui ont par cons�quent �t�
consid�r�es
comme des langues mortes. Elle a �t� largement utilis�e dans
l’enseignement
secondaire fran�ais dans la seconde moiti� du XIX�me si�cle. Il
s’agit
d’une m�thodologie qui a perdur� pendant plusieurs si�cles et qui a
contribu�
au d�veloppement de la pens�e m�thodologique. D’apr�s Christian Puren,
la
m�thodologie traditionnelle a donn� lieu entre le XVIII�me et le XIX�me
si�cles
� des variations m�thodologiques assez importantes, et a subi toute une
�volution interne qui a pr�par� l’av�nement de la m�thodologie directe.
Le
but essentiel de
cette m�thodologie �tait la lecture et la traduction de textes
litt�raires en
langue �trang�re, ce qui pla�ait donc l’oral au second plan. La langue
�tait
con�ue comme un ensemble de r�gles et d’exceptions que l’on
retrouvait et
l’on �tudiait dans des textes et qui pouvaient �tre rapproch�es de la
langue
maternelle. Cependant on accordait plus d’importance � la forme
litt�raire
qu’au sens des textes, m�me si celui-ci n’est pas totalement n�glig�.
Par
cons�quent il existe une langue “norm�e” et de qualit�, celle utilis�e
par les
auteurs litt�raires qui devait �tre pr�f�r�e � la langue orale et
imit�e
par les apprenants afin d’acqu�rir une comp�tence linguistique
ad�quate. La
culture �tait per�ue comme l’ensemble des oeuvres litt�raires et
artistiques
r�alis�es dans le pays o� l’on parle la langue �trang�re.
Au
XVIII�me si�cle,
la m�thodologie traditionnelle utilisait syst�matiquement le th�me
comme
exercice de traduction et la m�morisation de phrases comme technique
d’apprentissage de la langue. La grammaire �tait enseign�e de mani�re
d�ductive
( on pr�sentait d’abord la r�gle, puis on l’appliquait � des cas
particuliers
sous forme de phrases). C’est � cette �poque que s’est r�pandue
l’utilisation
d’un m�talangage grammatical dans l’enseignement des langues; un
m�talangage
dont l’h�ritage persiste encore aujourd’hui.
Au
XIX�me si�cle, on
a pu constater une �volution de la m�thodologie provoqu�e par
l’introduction de
la version-grammaire dont les pratiques consistaient � d�couper en
parties un
texte de la langue �trang�re et le traduire mot � mot � la langue
maternelle.
Cette traduction �tait le point de d�part d’une �tude th�orique de la
grammaire, qui n’occupait plus une place de choix dans l’apprentissage
et ne
pouvait donc plus �tre gradu�e par difficult�s. Par cons�quent, les
points
grammaticaux �taient abord�s dans l’ordre de leur apparition dans les
textes de
base.
L’instruction
de
l’Education Nationale du 18 septembre 1840 donnait une explication tr�s
pr�cise
de la m�thodologie traditionnelle et de son application en classe de
langue
�trang�re dans les lyc�es de l’�poque:
La
premi�re ann�e (...) sera consacr�e tout enti�re � la grammaire et � la
prononciation. Pour la grammaire, les �l�ves apprendront par c�ur pour
chaque
jour de classe la le�on qui aura �t� d�velopp�e par le professeur dans
la
classe pr�c�dente. Les exercices consisteront en versions et en th�mes,
o� sera
m�nag�e l’application des derni�res le�ons. (...) Pour la
prononciation, apr�s
en avoir expos� les r�gles on y accoutumera l’oreille par des dict�es
fr�quentes,
et on fera apprendre par c�ur et r�citer convenablement les morceaux
dict�s.
(...) Dans la seconde ann�e (...) les versions et les th�mes
consisteront
surtout en morceaux grecs et latins qu’on fera traduire en anglais et
en
allemand, et r�ciproquement. (...) Dans la troisi�me ann�e,
l’enseignement aura
plus particuli�rement un caract�re litt�raire.[1]
Etant
donn� le
faible niveau d’int�gration didactique que pr�sentait cette
m�thodologie, le
professeur n’avait pas besoin de manuel, il pouvait en effet choisir
lui-m�me
les textes en fonction de leur valeur litt�raire (subjective, bien
�videmment)
sans tenir vraiment compte de leurs difficult�s grammaticales et
lexicales.
Dans ces conditions, il n’existait aucun sch�ma de classe et les
activit�s se
juxtaposaient dans un ordre al�atoire. C’est l’enseignant qui dominait
enti�rement la classe et qui d�tenait le savoir et l’autorit�, il
choisissait
les textes et pr�parait les exercices, posait les questions et
corrigeait
les r�ponses. La langue utilis�e en classe �tait la langue maternelle
et
l’interaction se faisait toujours en sens unique du professeur vers les
�l�ves.
L’erreur n’�tant pas admise, le professeur la corrigeait
syst�matiquement comme
s’il s’agissait d’un outrage � la langue “norm�e”, la seule admissible.
Le
vocabulaire �tait
enseign� sous forme de listes de mots pr�sent�s hors contexte et que
l’apprenant devait conna�tre par c�ur. En effet, le sens des mots �tait
appris
� travers sa traduction en langue maternelle. On peut donc
constater que
la m�thodologie traditionnelle proposait un mod�le d’enseignement
imitatif qui
n’admettait aucune variation cr�ative de la part de l’�l�ve. La
rigidit� de ce
syst�me et les r�sultats d�cevants qu’il apportait ont contribu� � sa
disparition et � l’av�nement d’autres th�ories plus attrayantes pour
les
�l�ves.
D’apr�s
C. Puren,
d�s le milieu du XVIII�me si�cle, la demande sociale d’apprentissage
des
langues a �volu�. On a alors besoin d’une connaissance plus pratique
des
langues �trang�res. C’est ainsi qu’on assiste � la multiplication
d’ouvrages
didactiques qui se pr�tendent universalistes (ils visent des publics
h�t�rog�nes et souvent professionnels) et que l’on a appel� “cours
traditionnels � objectif pratique” (CTOP). Dans ces cours, on remet en
question
la m�thodologie grammaire-traduction et on pr�pare l’av�nement de la
m�thodologie directe. Les CTOP int�grent autour d’un texte de base des
contenus
grammaticaux grad�s et r�duits par rapport � la m�thodologie
traditionnelle,
ils multiplient et varient les exercices de r�emploi des formes
linguistiques
enseign�es, et introduisent au fur et � mesure des besoins des
apprenants des
listes de vocabulaire organis�es par rapport � des th�mes de la vie
quotidienne.
D’apr�s
Henri Besse,
la m�thodologie traditionnelle ne peut pas �tre consid�r�e efficace
puisque la
comp�tence grammaticale des apprenants a toujours �t� limit�e et que
les
phrases propos�es pour l’apprentissage �taient souvent artificielles.
Remise en
question, la m�thodologie traditionnelle coexistera vers la fin du
XIX�me
si�cle avec la m�thode naturelle. Puis, � partir des ann�es 1870 une
interminable pol�mique va opposer les traditionalistes aux partisans de
la
r�forme directe jusqu’en 1902, date � laquelle une instruction
officielle
imposera d’une mani�re autoritaire l’utilisation de la m�thodologie
directe
dans l’enseignement national, ce que C. Puren nomme “le coup d’�tat
p�dagogique
de 1902”
et sur lequel nous nous
pencherons plus tard. Rodriguez,
Seara: L'�volution des m�thodologies dans
l'enseignement du fran�ais
langue �trang�re depuis la m�thodologie traditionnel jusqu'� nos jours,
2004, 19 p. Dossier word
2. La
m�thode naturelle (M�thode des s�ries de F.
Gouin.)
La
m�thode naturelle
se situe � la fin du XIX�me si�cle et a coexist� avec la m�thodologie
traditionnelle de grammaire-traduction bien qu’elle suppose une
conception de
l’apprentissage radicalement oppos�e aux id�es pr�c�dentes. La th�orie
de F.
Gouin na�t de l’observation de ses propres probl�mes pour apprendre
l’allemand
par une m�thode traditionnelle et de l’observation du processus
d’apprentissage
de la langue maternelle par son petit-neveu. Il a en effet �t� le
premier �
s’interroger sur ce qu’est la langue et sur le processus
d’apprentissage d’une
langue pour en tirer des conclusions p�dagogiques. Pour F. Gouin, la
n�cessit�
d’apprendre des langues viendrait du besoin de l’homme de communiquer
avec
d’autres hommes et de franchir ainsi les barri�res culturelles. C’est
pourquoi
il faut enseigner l’oral aussi bien que l’�crit, m�me si l’oral doit
toujours
pr�c�der l’�crit dans le processus d’enseignement-apprentissage.
C’est
� partir de la
m�thode de F. Gouin que les m�thodes didactiques vont se baser sur des
th�ories
de l’apprentissage (psychologiques, sociologiques, linguistiques,
etc.).
Selon
F. Gouin,
l’apprentissage d’une langue �trang�re doit se faire � partir de la
langue
usuelle, quotidienne, si l’on pr�tend que cet apprentissage ressemble
le plus
possible � celui de la langue maternelle par l’enfant. D’apr�s lui, un
enfant
apprendrait sa langue maternelle par un principe “d’ordre”: il se
ferait
d’abord des repr�sentations mentales des faits r�els et sensibles, puis
il les
ordonnerait chronologiquement et enfin il les transformerait en
connaissances
en les r�p�tant dans le m�me ordre, apr�s une p�riode “d’incubation” de
cinq �
six jours. L’enfant n’apprendrait donc pas des mots sans rapport, sinon
qu’il
ajouterait les nouvelles connaissances � son acquis personnel. La
langue �tant
essentiellement orale, l’oreille serait l’organe r�ceptif du langage,
c’est
pourquoi l’enfant devrait �tre plac� en situation d’�coute prolong�e en
langue
�trang�re. C’est pour cela que pour C. Germain, F. Gouin peut
�tre
consid�r� comme le pionnier de l’immersion et le premier � avoir prim�
le sens
sur la forme et la proposition sur le mot.
F.
Gouin avait une
particuli�re conception de la langue que nous n’allons pas nous
attarder �
pr�senter ici, qui lui a permis de cr�er la m�thode des s�ries.
Une
“s�rie linguistique” �tant pour lui une suite encha�n�e de r�cits, de
descriptions, de th�mes qui reproduisent dans l’ordre chronologique
tous les
moments et ph�nom�nes connus de ce th�me. C’est ainsi qu’il dresse une
“s�rie”
de phrases qui repr�sentent dans l’ordre chronologique toutes les
actions
n�cessaires pour, par exemple, aller puiser de l’eau. Il �tablit une
progression de th�mes de la vie quotidienne par difficult�s. Cependant,
sa
m�thode reste incompl�te car il ne pr�sente que quelques-unes des
s�ries
possibles.
En
d�pit des
critiques qui ont �t� faites � la m�thode naturelle de F. Gouin et de
la
difficult� de sa mise en place dans le syst�me scolaire, il est
ind�niable que
cette m�thode a provoqu� une certaine r�volution en s’opposant
radicalement �
la m�thodologie traditionnelle utilis�e par ses contemporains.
Rodriguez, Seara: L'�volution des
m�thodologies dans
l'enseignement du fran�ais
langue �trang�re depuis la m�thodologie traditionnel jusqu'� nos jours,
19 p. Dossier word
La
m�thodologie
directe est consid�r�e historiquement par C. Puren comme la
premi�re
m�thodologie sp�cifique � l’enseignement des langues vivantes
�trang�res. Elle
r�sulte d’une �volution interne de la m�thodologie traditionnelle
(apparition
des CTOP), et de la m�thode naturelle qui a anticip� certains de ses
principes.
De plus, de nombreux facteurs externes dont nous parlerons plus tard
ont
impuls� son d�veloppement.
On
appelle
m�thodologie directe la m�thode utilis�e en Allemagne et en France vers
la fin
du XIX�me si�cle et le d�but du XX�me si�cle. Elle s’est �galement plus
ou
moins r�pandue aux Etats-Unis. En France l’expression “m�thode directe”
appara�t pour la premi�re fois dans la Circulaire du 15 novembre 1901,
qui
l’opposait syst�matiquement � la m�thodologie traditionnelle de
grammaire-traduction en raison de son principe direct. Dans cette
circulaire,
on oblige pour la premi�re fois tous les professeurs de langue
�trang�re �
utiliser une m�thodologie unique, ce qui n’a pas manqu� d’engendrer une
forte
pol�mique entre partisans et opposants du nouveau syst�me
d’enseignement.
D�s
la fin du XIX�me
si�cle la France d�sirait s’ouvrir sur l’�tranger. La soci�t� ne
voulait plus
d’une langue exclusivement litt�raire, elle avait besoin d’un outil de
communication qui puisse favoriser le d�veloppement des �changes
�conomiques,
politiques, culturels et touristiques qui s’acc�l�rait � cette �poque.
L’�volution
des
besoins d’apprentissage des langues vivantes �trang�res a provoqu�
l’apparition
d’un nouvel objectif appel� “pratique” qui visait une ma�trise
effective de la
langue comme instrument de communication.
La
m�thodologie
directe constituait une approche naturelle de l’apprentissage d’une
langue
�trang�re fond�e sur l’observation de l’acquisition de la langue
maternelle par
l’enfant.
Les
principes fondamentaux qui la d�finissent sont:
La
m�thodologie
directe se base sur l’utilisation de plusieurs m�thodes: m�thode
directe,
active et orale.
Par
m�thode directe
on d�signait l’ensemble des proc�d�s et des techniques permettant
d’�viter le
recours � l’interm�diaire de la langue maternelle dans l’apprentissage,
ce qui
a constitu� un bouleversement dans l’enseignement des langues
�trang�res.
Cependant l’opinion des m�thodologues directs sur l’utilisation de la
langue
maternelle divergeait: certains �taient partisans d’une interdiction
totale
(th�se adopt�e dans l’Instruction de 1908), tandis que la plupart
�taient
conscients qu’une telle intransigeance serait n�faste et pr�f�raient
une
utilisation plus souple de la m�thode directe.
Par
m�thode orale on
d�signait l’ensemble des proc�d�s et des techniques visant � la
pratique orale
de la langue en classe. Les productions orales des �l�ves en classe
constituaient
une r�action aux questions du professeur afin de pr�parer la pratique
orale
apr�s la sortie du syst�me scolaire. L’objectif de la m�thode orale
�tait donc
pratique. Le passage � l’�crit restait au second plan et �tait con�u
comme le
moyen de fixer par l’�criture ce que l’�l�ve savait d�j� employer
oralement,
c’est ce que certains ont nomm� un "oral scriptur�". D’apr�s
l’instruction de 1902, la progression vers la r�daction libre passait
par la
dict�e, puis par des reproductions de r�cits lus en classe et enfin par
des
exercices de composition libre.
Par
m�thode active
on d�signait l’emploi de tout un ensemble de m�thodes :
interrogative,
intuitive, imitative, r�p�titive ainsi que la participation active
physiquement
de l’�l�ve.
La
m�thode interrogative
incitait les �l�ves � r�pondre aux questions du professeur, afin de
r�employer
les formes linguistiques �tudi�es. Il s’agissait donc d’exercices
totalement
dirig�s.
La
m�thode intuitive
proposait une explication du vocabulaire qui obligeait l’�l�ve � un
effort
personnel de divination � partir d’objets ou d’images. La pr�sentation
des
r�gles de grammaire se r�alisait �galement � partir d’exemples, sans
passer par
l’interm�diaire de la langue maternelle. La compr�hension se faisait
donc de
mani�re intuitive.
La
m�thode imitative
avait comme but principal l’imitation acoustique au moyen de la
r�p�tition
intensive et m�canique. Elle s’appliquait aussi bien � l’apprentissage
de la
phon�tique qu’� celui de la langue en g�n�ral.
La
m�thode
r�p�titive s’appuyait sur le principe qu’on retient mieux en r�p�tant.
La
r�p�tition pouvait �tre extensive ou intensive. Cependant l’emploi
intensif du
vocabulaire donnerait lieu � une inflation lexicale incontr�lable et
n�gative
pour l’enseignement-apprentissage de la langue.
Finalement,
l’appel
� l’activit� physique de l’�l�ve pour la dramatisation de
sayn�tes, la
lecture expressive accompagn�e par des mouvements corporels, etc.
permettrait
d’augmenter la motivation chez l’apprenant.
On
peut estimer que
c’est � partir de la m�thodologie directe que la didactique des langues
vivantes �trang�res a fait appel � la p�dagogie g�n�rale: on tenait en
effet
compte de la motivation de l’�l�ve, on adaptait les m�thodes aux
int�r�ts, aux
besoins et aux capacit�s de l’�l�ve, en faisant progresser les contenus
du
simple au complexe. C’est pourquoi C. Puren estime que la rupture entre
la
m�thodologie traditionnelle et la m�thodologie directe “se situe au
niveau de
la p�dagogie g�n�rale de r�f�rence”[3] ce
qui suppose une grande nouveaut� dans l’enseignement scolaire.
Le
d�clin de la
m�thodologie directe fut provoqu� par des probl�mes aussi bien internes
qu’externes. Les probl�mes internes les plus importants ont �t�
l’incontr�lable
inflation lexicale et l’intransigeance dans l’utilisation de la langue
maternelle. En ce qui concerne les probl�mes externes ont peut citer le
refus
par les enseignants d’une m�thodologie qui leur a �t� impos�e par une
instruction officielle et l’ambition excessive de cette m�thodologie
qui
exigeait des professeurs une excellente ma�trise de la langue orale
sans pour
autant offrir un recyclage massif des enseignants. Raison pour laquelle
L.
Marchand la qualifie de “v�ritable gaspillage d’�nergie”.[4]
On peut
ajouter que la plupart des enseignants
ont contourn� la m�thodologie directe et se sont lanc�s dans une
p�riode
d’�clectisme pendant laquelle ils utilisaient le manuel direct d’une
mani�re
traditionnelle, r�pondant vraisemblablement ainsi � un manque
d’identification
avec une m�thodologie trop innovante. Rodriguez, Seara:
L'�volution des
m�thodologies dans
l'enseignement du fran�ais
langue �trang�re depuis la m�thodologie traditionnel jusqu'� nos jours,
19 p. Dossier word
La m�thodologie
active a �t� utilis�e d’une mani�re g�n�ralis�e dans l’enseignement
scolaire
fran�ais des langues vivantes �trang�res depuis les ann�es 1920
jusqu’aux
ann�es 1960. Cependant on constate une certaine confusion
terminologique en ce
qui concerne cette m�thodologie. En effet, on la nommait �galement
“m�thodologie �clectique”, “m�thodologie mixte”, “m�thodologie orale”,
“m�thodologie directe”, etc. Cette r�ticence � nommer cette nouvelle
m�thodologie
r�v�le la volont� d’�clectisme de l’�poque et le refus d’une
m�thodologie
unique. Certains l’appelaient m�thodologie de synth�se, consid�rant
qu’elle
repr�sentait un compromis entre la m�thodologie directe et la
m�thodologie
traditionnelle, alors que d’autres, comme C. Germain, ne la consid�rant
pas
comme une m�thodologie � part enti�re, pr�f�rent l’ignorer.
La m�thodologie
active repr�sente un compromis entre le retour � certains proc�d�s et
techniques traditionnels et le maintien des grands principes de la
m�thodologie
directe. Lieutaud estime “qu’elle est en quelque sorte une m�thode
directe
assouplie...”[5]. C’est
pourquoi on peut dire que la
m�thodologie active se veut une philosophie de l’�quilibre.
Ce sont les
probl�mes d’adaptation de la m�thodologie directe en second cycle qui
ont
orient� d�s 1906 les m�thodologues directs vers une solution
�clectique. La
volont� d’int�gration de l’enseignement des langues vivantes �trang�res
dans
l’enseignement scolaire �tait devenu le principal souci des
m�thodologues
actifs. Ils revendiquent un �quilibre global entre les trois objectifs
de
l’enseignement-apprentissage: formatif, culturel et pratique. Faisant
preuve de
pragmatisme, ils permettaient l’utilisation de la langue maternelle en
classe.
En ce sens, on peut dire qu’ils ont r�ellement assoupli la rigidit� de
la
m�thode pr�c�dente. Ils n’h�sitaient pas � int�grer tous les
proc�d�s
compatibles avec les objectifs de la m�thode, lui conf�rant ainsi un
caract�re
�clectique, et proposaient une ouverture aux innovations techniques.
Cependant, cet
�clectisme technique n’a pas modifi� le noyau dur de la m�thodologie
directe,
ne faisant qu’introduire certaines variations. On constate ainsi un
assouplissement de la m�thode orale qui rendait au texte �crit sa place
comme
support didactique. Cependant les textes de base �taient plus
souvent
descriptifs ou narratifs que dialogu�s.
On a �galement
privil�gi� l’enseignement de la prononciation � travers les proc�d�s de
la
m�thode imitative directe. La phon�tique �tait enseign�e � la mani�re
des
manuels d’anglais de l’�poque et c’est avec l’instruction de 1969 que
s’est
d�velopp�e l’utilisation des auxiliaires audio-oraux (gramophone,
radio,
magn�tophone).
En outre on
constate
un assouplissement de l’enseignement du vocabulaire puisqu’on
n’interdisait
plus le recours � la langue maternelle comme proc�d� d’explication. Par
cons�quent il �tait permis d’utiliser la traduction pour expliquer le
sens des
mots nouveaux. Cependant, dans tous les cours de FLE de cette �poque on
retrouve des le�ons sur des th�mes de la vie quotidienne dans
lesquelles on
utilisait des images pour faciliter la compr�hension et �viter si
possible la
traduction du vocabulaire. D’autre part, on se souciait
particuli�rement de
contr�ler l’inflation lexicale, v�ritable b�te noire de la m�thodologie
directe.
L’enseignement
de la
grammaire s’est �galement assoupli. On a privil�gi� l’apprentissage
raisonn� en
consid�rant que l’apprenant avait besoin de se rendre compte du
pourquoi des
ph�nom�nes. On essayait donc d’�viter l’empirisme dans l’enseignement
de la
grammaire et on utilisait une d�marche inductive qui privil�giait la
morphologie sur la syntaxe.
Avec la
m�thodologie
active, l’enseignement du vocabulaire et de la grammaire ne se faisait
plus sur
le mode de la r�p�tition intensive, on lui pr�f�rait plut�t la
r�p�tition
extensive des structures.
De m�me la
m�thode
active �tait amplement valoris�e afin d’adapter les m�thodes utilis�es
�
l’�volution psychologique de l’�l�ve et de cr�er une ambiance favorable
� son
activit� puisque la motivation de l’apprenant �tait consid�r�e comme un
�l�ment
cl� dans le processus d’apprentissage.
Cependant
l’instruction de 1969 va supposer une rupture avec la m�thodologie
active et
favorisera le passage � la m�thodologie audiovisuelle, r�pondant ainsi
� un
objectif pratique. Les m�thodologies audio-orale et audiovisuelle
auront comme
objectif la recherche d’une coh�rence maximale. C’est pourquoi elles
int�greront des th�ories de r�f�rence, comme le distributionnalisme et
le
b�haviorisme, et utiliseront de nouveaux mat�riels p�dagogiques, comme
le
laboratoire de langues, le magn�tophone, le projecteur de vues fixes,
entre
autres. Rodriguez, Seara: L'�volution des
m�thodologies dans
l'enseignement du fran�ais
langue �trang�re depuis la m�thodologie traditionnel jusqu'� nos jours,
19 p. Dossier word
La
m�thodologie audio-orale na�t au cours de la deuxi�me guerre mondiale
pour
r�pondre aux besoins de l’arm�e am�ricaine de former rapidement des
gens
parlant d’autres langues que l’anglais. On a alors fait appel au
linguiste
Bloomfield qui va cr�er “la m�thode de l’arm�e”. Cette m�thode n’a dur�
en
r�alit� que deux ans, mais elle a provoqu� un grand int�r�t dans le
milieu
scolaire. C’est dans les ann�es 1950 que des sp�cialistes de la
linguistique
appliqu�e comme Lado, Fries, etc. ont cr�� la m�thode audio-orale
(MAO), en
s’inspirant des principes de la m�thode de l’arm�e. Pour C. Puren
la MAO
am�ricaine, comme la m�thodologie directe fran�aise, un demi-si�cle
plus t�t, a
�t� cr��e en r�action contre la m�thodologie traditionnelle dominante
aux USA �
cette �poque.
La m�thodologie
audio-orale constituait un m�lange de la psychologie b�havioriste et du
structuralisme linguistique qui a largement influenc� l’enseignement de
la
grammaire gr�ce aux “pattern drills” ou “cadres syntaxiques”.
D’un point de
vue
linguistique, la MAO s’appuyait principalement sur les travaux
d’analyse
distributionnelle des disciples de Bloomfield. Ce type d’analyse
consid�rait la
langue dans ses deux axes: paradigmatique et syntagmatique. Ceci
explique que
les exercices structuraux (pattern drills, tables de substitutions,
tables de
transformations) proposaient aux apprenants d’effectuer sur les
structures
introduites en classe les deux manipulations de base: la substitution
des
unit�s les plus petites de la phrase ou la transformation
d’une
structure � une autre. Il s’agissait donc d’exercices de r�p�tition ou
d’exercices d’imitation � partir desquels les apprenants devaient �tre
capables
de r�employer la structure en proposant de nouvelles variations
paradigmatiques.
La MAO
s’appuyait
�galement sur la psychologie b�havioriste cr��e initialement par J. B.
Watson
et d�velopp�e post�rieurement par B. F. Skinner. Le langage, selon
cette
th�orie, n’�tait qu’un type de comportement humain et son sch�ma de
base �tait
le r�flexe conditionn�: stimulus-r�ponse-renforcement. Les r�ponses
d�clench�es
par les stimulus �taient suppos�es devenir des r�flexes, c’est-�-dire
des
acquis d�finitifs. C’est pourquoi le laboratoire de langues va devenir
l’auxiliaire privil�gi� de la r�p�tition intensive car il
faciliterait la
m�morisation et l’automatisation des structures de la langue.
Le but de la MAO
�tait de parvenir � communiquer en langue �trang�re, raison pour
laquelle
on visait les quatre habilet�s afin de communiquer dans la vie de
tous
les jours. Cependant, on continuait � accorder la priorit� � l’oral. On
concevait la langue comme un ensemble d’habitudes, d’automatismes
linguistiques
qui font que des formes linguistiques appropri�es sont utilis�es de
fa�on
spontan�e. On niait la conception universaliste de la langue en
consid�rant que
chaque langue a son propre syst�me phonologique, morphologique et
syntaxique.
Comme on ne consid�rait pas le niveau s�mantique, la signification
n’occupait
pas une place prioritaire en langue �trang�re. C’est pourquoi le
vocabulaire
�tait rel�gu� au second plan par rapport aux structures syntaxiques. De
plus,
les habitudes linguistiques de la langue maternelle �taient
consid�r�es
principalement comme une source d’interf�rences lors de l’apprentissage
d’une
langue �trang�re; afin de les �viter, il �tait recommand� d’utiliser la
langue
�trang�re en classe.
La MAO a �t�
critiqu�e pour le manque de transfert hors de la classe de ce qui a �t�
appris
et on a consid�r� que sa validit� se limitait au niveau �l�mentaire. De
m�me, �
l’enthousiasme pour les exercices structuraux a succ�d� la d�ception.
En effet
les exercices ennuyaient les �l�ves, les d�motivaient et le passage du
r�emploi
dirig� au r�emploi spontan� ne se faisait que rarement.
D’un autre c�t�,
la
grammaire g�n�rative-transformationnelle chomskyenne s’est attaqu�e au
structuralisme linguistique bloomfieldien en lui reprochant de ne
s’int�resser
qu’aux ph�nom�nes de surface et de n�gliger les structures profondes de
la
langue. Pour les g�n�rativistes, apprendre une langue ne consisterait
pas
seulement � acqu�rir “un simple syst�me d’habitudes qui seraient
contr�l�es
par des stimulus de l’environnement” mais � assimiler “un syst�me
de
r�gles qui permet de produire des �nonc�s nouveaux et de comprendre des
�nonc�s
nouveaux”.
A partir du
d�but
des ann�es 1960, on a assist� � une importante influence de la
linguistique sur la didactique du fran�ais langue �trang�re.
L’expression
“linguistique appliqu�e” devient alors synonyme de “p�dagogie des
langues” ce
qui r�v�le son influence sur la didactique des langues �trang�res en
France.
M�me si les r�f�rences � la MAO et aux principes de la linguistique
appliqu�e
sont tr�s nombreuses dans le discours didactique fran�ais de cette
�poque,
cette m�thodologie a eu une influence limit�e en France parce qu’aucun
cours
audio-oral n’a �t� publi� ni pour l’enseignement du FLE ni pour celui
des
langues vivantes �trang�res en milieu scolaire. Rodriguez, Seara:
L'�volution des
m�thodologies dans
l'enseignement du fran�ais
langue �trang�re depuis la m�thodologie traditionnel jusqu'� nos jours,
19 p. Dossier word
M�thode
audio-orale
Ensemble de principes m�thodologiques (> M�thode 1) qui ont trouv�
leur expression la plus nette � partir de 1950 aux Etats-Unis et de
1960 en France, et qui s’appuient explicitement sur :
6.
La m�thode audio-visuelle
A partir
de
la deuxi�me guerre mondiale, l’anglais devient de plus en plus la
langue des
communications internationales et le fran�ais se sent alors menac�. La
France a
besoin de renforcer son implantation dans les colonies, de restaurer
son
prestige � l’�tranger et de lutter contre l’essor de l’anglais. Elle va
faire
de l’enseignement du FLE une affaire d’Etat. C’est pourquoi le
Minist�re de
l’Education Nationale a mis sur pied une Commission charg�e de mettre
au
point “le fran�ais �l�mentaire” (rebaptis� plus tard fran�ais
fondamental),
con�u comme une gradation grammaticale et lexicale �labor�e �
partir de
l’analyse de la langue parl�e. C’est le linguiste G. Gougenheim et le
p�dagogue
P. Rivenc entre autres qui sont charg�s de cette mission en vue de
faciliter
l’apprentissage et par-l� m�me la diffusion du fran�ais.
Les
m�thodologues du CREDIF vont publier en 1954 les r�sultats de cette
�tude
lexicale en deux listes: un fran�ais fondamental premier degr�
constitu� de
1475 mots, puis un fran�ais fondamental second degr� comprenant 1609
mots. Le
fran�ais fondamental est consid�r� comme une base indispensable pour
une
premi�re �tape d’apprentissage du FLE pour des �l�ves en situation
scolaire. Il
d�sire leur proposer une acquisition progressive et rationnelle de la
langue
qui devrait leur permettre de mieux la ma�triser. Le fran�ais
fondamental a �t�
l’objet de beaucoup de critiques surtout d’ordre linguistique: pour
certains,
c’�tait un crime contre l’int�grit� de la langue fran�aise, pour
d’autres,
il devait �tre actualis� car certains dialogues “fabriqu�s”
pr�sentaient une
langue peu vraisemblable, il devait �galement tenir en compte les
besoins
langagiers et les motivations r�elles du public vis�. C’est ce que
pr�tendra
faire plus tard le CREDIF avec un Niveau Seuil.
C’est au milieu
des
ann�es 1950 que P. Guberina de l’Universit� de Zagreb donne les
premi�res
formulations th�oriques de la m�thode SGAV (structuro-globale
audio-visuelle).
La m�thodologie audiovisuelle (MAV) domine en France dans les ann�es
1960-1970
et le premier cours �labor� suivant cette m�thode, publi� par le CREDIF
en
1962, est la m�thode “Voix et images de France”.
La coh�rence de
la
m�thode audiovisuelle �tait construite autour de l’utilisation
conjointe de
l’image et du son. Le support sonore �tait constitu� par des
enregistrements
magn�tiques et le support visuel par des vues fixes. En effet, les
m�thodes
audiovisuelles avaient recours � la s�quence d’images pouvant �tre de
deux
types: des images de transcodage qui traduisaient l’�nonc� en rendant
visible
le contenu s�mantique des messages ou bien des images situationnelles
qui
privil�giaient la situation d’�nonciation et les composantes non
linguistiques
comme les gestes, les attitudes, les rapports affectifs, etc.
Selon C.
Puren, la MAV fran�aise est une m�thode originale, parce qu’elle
constitue une
synth�se in�dite entre l’h�ritage direct, la m�thodologie induite par
les
moyens audiovisuels et une psychologie de l’apprentissage sp�cifique,
le
structuroglobalisme. La MAV se situait dans le prolongement de la
m�thodologie
directe tout en essayant de donner des solutions aux probl�mes auxquels
s’�taient heurt�s les m�thodologues directs. Les didacticiens fran�ais
ont
�galement reconnu l’influence d�cisive am�ricaine dans les d�buts de
l’�laboration de la MAV fran�aise, cependant c’est Chomsky qui
influencera la
suite de son �laboration et la m�thodologie finie.
Dans la
m�thodologie audiovisuelle, les quatre habilet�s �taient vis�es, bien
qu’on
accord�t la priorit� � l’oral sur l’�crit. La MAV prend aussi en compte
l’expression des sentiments et des �motions, non consid�r�s auparavant.
Sur
le
plan de l’apprentissage, la MAV suivait la th�orie de la Gestalt, qui
pr�conisait la perception globale de la forme, l’int�gration par le
cerveau,
dans un tout, des diff�rents �l�ments per�us par les sens. Dans le cas
des
langues, l’apprentissage passerait par l’oreille et la vue. La
langue
�tant consid�r�e comme un ensemble acousticovisuel, la grammaire, les
clich�s,
la situation et le contexte linguistique avaient pour but de faciliter
l’int�gration c�r�brale des stimuli ext�rieurs.
D’apr�s
C.
Puren, toutes les m�thodes pr�sentes dans la m�thodologie directe se
retrouvent
organis�es dans la MAV.
Pour
la m�thode directe ce sont les images qui servent de point de d�part
pour une
compr�hension directe, c’est-�-dire sans passer par la langue
maternelle. Cette
m�thode s’appliquera aussi bien � l’enseignement du lexique (sans
recourir � la
traduction en langue maternelle) qu’� l’enseignement grammatical
(sans
l’interm�diaire de la r�gle, l’apprenant saisit les r�gles de mani�re
intuitive). Comme la m�thode directe, la m�thode audiovisuelle
s’appuie
sur un document de base dialogu� con�u pour pr�senter le vocabulaire et
les
structures � �tudier.
En
ce qui concerne la m�thode orale, le support audiovisuel remplace le
support
�crit. La forme “dialogu�e” du dialogue de base vise � faciliter son
exploitation orale en classe. L’accent est plac� d�s le d�but sur la
correction
phon�tique en �vitant les interf�rences de la graphie.
La
m�thode active est pr�sente dans la MAV puisqu’on sollicite l’activit�
de
l’�l�ve � travers l’image qui stimule la motivation. Les personnages
pr�sent�s
dans les dialogues se veulent proches des �l�ves afin qu’ils
s’identifient �
eux. L’enseignement lexical et grammatical se fait d’une mani�re
intuitive. Le
vocabulaire de base est s�lectionn� et pr�sent� � partir de centres
d’int�r�t
inspir�s du fran�ais fondamental.
La
m�thode interrogative appara�t �galement car la MAV consid�re
n�cessaire un
dialogue constant entre le professeur et la classe sans que celle-ci ne
d�pende
enti�rement de lui. En effet, gr�ce au support audiovisuel il est
possible de rompre le face � face �l�ve-professeur.
La
m�thode intuitive en fait aussi partie �tant donn� que l’image
audiovisuelle
permet au professeur d’�viter les “pitreries” auxquelles il �tait
condamn� par
la m�thodologie directe. Le dialogue sert � illustrer dans un
contexte un
nombre de mots usuels nouveaux par un proc�d� intuitif. En effet
l’�l�ve
�tablit une association syst�matique du dialogue et de l’image charg�e
de
repr�senter la situation de communication. La MAV se diff�rencie de la
m�thodologie directe parce qu’elle interdit toute explication
grammaticale. Les
exercices structuraux fonctionnent comme une technique d’application de
la
m�thode intuitive int�grale en enseignement grammatical et c’est le
professeur
qui facilitera � l’�l�ve au cours des exercices l’analyse implicite des
structures.
Et finalement
les
m�thodes imitative et r�p�titive que l’on retrouve dans les exercices
de
m�morisation et dramatisation du dialogue de base, et dans les
exercices
structuraux r�alis�s au laboratoire ou dans les exercices �crits.
D’apr�s H.
Besse, la
m�thodologie Structuro-globale-audiovisuelle serait plus proche de la
m�thodologie directe europ�enne que de l’audio-orale am�ricaine et
pr�senterait
�galement des affinit�s avec la m�thode situationnelle anglaise. En ce
sens la
SGAV aurait le m�rite de tenir compte du contexte social d’utilisation
d’une
langue et permettrait d’apprendre assez vite � communiquer oralement
avec des
natifs de langues �trang�res, mais n’offrirait pas la possibilit� de
comprendre
des natifs parlant entre eux ni les m�dias.
Pour conclure,
l’une
des principales raisons du succ�s des m�thodes audiovisuelles semble
correspondre au faible investissement qu’elles requi�rent de ceux qui
les
pratiquent. Cependant la m�thodologie SGAV est entr�e en d�clin et a
c�d� sa
place � l’approche communicative bas�e sur d’autres th�ories
linguistiques (le
fonctionnalisme) et psychologiques (le cognitivisme). Rodriguez,
Seara: L'�volution des
m�thodologies dans
l'enseignement du fran�ais
langue �trang�re depuis la m�thodologie traditionnel jusqu'� nos jours,
19 p. Dossier word
M�thode
audio-visuelle
Ensemble d’hypoth�ses m�thodologiques qui ont trouv� leur expression,
en France en particulier, avec les travaux des �quipes de Zagreb et de
Saint Cloud, � partir des ann�es 1950. Ces hypoth�ses, ensuite
diversi-fi�es et adapt�es par d’autres m�thodologues, s’appuient sur
les consid�rations, les choix et les principes suivants.
Au plan m�thodologique :
L’approche
communicative s’est d�velopp�e en France � partir des ann�es 1970 en
r�action
contre la m�thodologie audio-orale et la m�thodologie audio-visuelle.
Elle
appara�t au moment o� l’on remet en cause en Grande-Bretagne l’approche
situationnelle et o� aux USA la grammaire
g�n�rative-transformationnelle de
Chomsky est en plein apog�e. Elle est appel�e approche et non
m�thodologie par
souci de prudence, puisqu’on ne la consid�rait pas comme une
m�thodologie
constitu�e solide. Quoique Chomsky ait beaucoup critiqu� les m�thodes
audio-orale et situationnelle, sa linguistique n’est pas directement la
source
de l’approche communicative. En effet, c’est la convergence de quelques
courants de recherche ainsi que l’av�nement de diff�rents besoins
linguistiques
dans le cadre europ�en ( March� commun, Conseil de l’Europe, etc.) qui
a en
d�finitive donn� naissance � l’approche communicative.
Il n’y a pas de
rupture dans les objectifs entre les m�thodes structurales et la
m�thode
fonctionnelle comme cela avait �t� le cas entre les m�thodologies
directe et
traditionnelle. La diff�rence se situe au niveau de la comp�tence: pour
les
structuralistes l’important est la comp�tence linguistique tandis que
pour les
fonctionnalistes il faut privil�gier la comp�tence de communication,
c’est-�-dire l’emploi de la langue.
A ce moment-l�
l’int�r�t de nombreux psychologues, sociologues, p�dagogues,
didacticiens s’est
port� sur les besoins d’un nouveau public compos� d’adultes,
principalement de
migrants. En effet, la loi de juillet 1971 insistait sur le droit � la
formation continue, c’est pourquoi on a mis en place de nouvelles
structures
d’enseignement et de recherche pour donner naissance � une nouvelle
m�thodologie. Pour sa part, l’enseignement des langues �trang�res en
milieu
scolaire a cherch� � s’approprier le syst�me d’enseignement des langues
�trang�res pour adultes ins�r�s dans le monde du travail, ce qui a
produit une
brusque inversion du mod�le �ducatif de r�f�rence. En France
cette loi
sur la formation continue a permis d’obtenir des moyens financiers pour
la
cr�ation de deux ouvrages cl�s command�s par des organismes publics: un
Niveau
Seuil par le Conseil de l’Europe, et Analyse de besoins
langagiers
d’adultes en milieu professionnel par le Secr�tariat d’Etat aux
Universit�s. Gr�ce � ces cr�dits et pour la premi�re fois en didactique
des
langues on a pu composer des �quipes de chercheurs pluridisciplinaires.
Dans les ann�es
1960, la MAV se basait pour la s�lection et la gradation linguistiques
sur des
listes de fr�quence (Fran�ais Fondamental) suppos�es correspondre � la
langue
de base devant �tre acquise quel que soit l’usage post�rieur de la
langue
�trang�re. Mais au d�but des ann�es 1970, les m�thodologues de FLE se
sont
trouv�s confront�s aux probl�mes sp�cifiques pos�s par l’enseignement
du
fran�ais langue �trang�re � des �tudiants non-sp�cialistes de fran�ais,
dans
leurs pays, pour leur permettre l’acc�s � des documents �crits de
caract�re
informationnel. Les choix d’objectifs, de contenus et de m�thodes
�taient donc
motiv�s par la situation des pays concern�s et par les besoins pr�sents
et
futurs des �tudiants de ces pays.
La MAV, m�me
adapt�e
� un contenu scientifique, ne pouvait convenir � ce genre de public,
puisqu’elle donnait la priorit� � l’expression orale, proposait une
acquisition
tr�s progressive du lexique � partir d’un tronc commun et ne
travaillait pas
au-del� du niveau de la phrase. Cette approche fut appel�e tout d’abord
fran�ais instrumental et par la suite fran�ais fonctionnel �tant donn�
la
diversit� du public vis�: ouvriers migrants, scientifiques,
techniciens,
�tudiants en formation, etc. Contre l’approche universaliste de la MAV
s’imposait ainsi une approche diversifi�e dont la pr�occupation �tait
de
s’adapter aux besoins langagiers de chaque public. Toute une partie de
la
recherche en didactique des langues vivantes �trang�res va s’orienter
dans les
ann�es 1970 vers l’analyse des besoins avant m�me d’�laborer un cours
de
langue. Ceci provoque une nouvelle d�finition d’apprentissage:
Apprendre
une langue, c’est apprendre � se comporter de mani�re ad�quate dans des
situations de communication o� l’apprenant aura quelque chance de se
trouver en
utilisant les codes de la langue cible.
Le fran�ais
instrumental ne vise pas la communication orale, autrement qu’en
situation de
classe, il d�sire satisfaire un besoin de compr�hension imm�diat, il
s’agit
d’acqu�rir une comp�tence de compr�hension. Il s’int�resse � la
compr�hension
de textes sp�cifiques plut�t qu’� la production.
Le fran�ais
fonctionnel,
lui, est fond� sur les besoins langagiers r�els des individus. Il
envisage une
relation de locuteur � locuteur dans certaines situations de
communication, et
selon certains r�les sociaux. Un Niveau Seuil est la tentative la
plus
importante d’�laboration d’un fran�ais fonctionnel pour l’enseignement
du
fran�ais � des �trangers adultes. On d�termine les besoins langagiers
des
apprenants en fonction des actes de parole qu’ils auront � accomplir
dans
certaines situations. Cependant le fran�ais fonctionnel et le fran�ais
instrumental ont le m�me objectif p�dagogique, celui de l’enseignement
volontairement limit� plus ou moins utilitaire et r�pondant � un appel
urgent
d’un public sp�cialis�.
Jusque l� en
enseignement scolaire les besoins langagiers �taient inconnus.
L’enseignant
fixait les contenus d’apprentissage � partir d’objectifs g�n�raux.
D’apr�s
Richterich l’enseignement d’une langue est �troitement li� au type de
public
auquel il s’adresse, il est donc indispensable de faire une description
minutieuse
du public vis�. M�me si la notion de besoin est ambigu� et se confond
parfois
avec int�r�t, but, etc., l’�l�ve demande d’autant plus de formation
qu’il a
lui-m�me une formation plus large. N�anmoins, il existe de nombreux
facteurs de
diversification des besoins des apprenants selon le pays o� il habite
et les
contacts que ce pays entretient avec les pays o� l’on parle la langue
�trang�re, son niveau de langue, la fili�re choisie dans ses �tudes et
les
propres diff�rences entre individus.
L’�valuation des
besoins des apprenants en milieu scolaire restait cependant difficile �
�tablir
�tant donn� qu’ils �taient souvent incapables de les exprimer
clairement. Il
reviendrait donc au didacticien d’�tablir une liste de besoins plus ou
moins
g�n�raux pour le milieu scolaire, de peur qu’on en arrive � supprimer
l’�tude
des langues �trang�res � l’�cole jusqu’� l’�ge o� l’apprenant puisse
communiquer personnellement ses besoins linguistiques. De m�me les
besoins ne
pouvaient �tre d�finis une fois pour toutes en d�but d’apprentissage
puisqu’ils
�voluent au cours m�me du processus d’apprentissage.
La notion de
besoin
langagier a �t� controvers�e et certains, comme D. Coste, pensent que
la notion
de besoin langagier n’aurait pas d’existence r�elle. En effet, il n’y
aurait
que des besoins d’�tre et de se r�aliser � travers le langage ou m�me
des
besoins de survivre dans le cas des migrants. En r�alit� seuls des
sp�cialistes
du langage comme les po�tes et les �crivains auraient d’authentiques
besoins
langagiers, car ils utilisent la langue pour elle-m�me. De m�me,
pour H.
Besse, l’approche fonctionnelle se pr�occuperait trop des besoins de
l’apprenant et pas assez de ce qu’il a appell� “ses potentialit�s
d’apprentissage”, c’est-�-dire ses propres strat�gies d’apprentissage
et les
“savoir-apprendre” qu’il a d�j� assimil�s dans sa culture maternelle.
Pour les
m�thodologues, les �tudiants qui ont besoin d’apprendre le fran�ais
pour des
raisons professionnelles seraient motiv�s par une approche
fonctionnelle,
contrairement aux apprenants en milieu scolaire qui apprennent une
langue
�trang�re par obligation.
Dans l’approche
communicative les quatre habilet�s peuvent �tre d�velopp�es puisque
tout d�pend
des besoins langagiers des apprenants. La langue est con�ue comme un
instrument
de communication ou d’interaction sociale. Les aspects linguistiques
(sons,
structures, lexique, etc.) constituent la comp�tence grammaticale qui
ne serait
en r�alit� qu’une des composantes d’une comp�tence plus globale: la
comp�tence
de communication. Elle prend en compte les dimensions linguistique et
extralinguistique qui constituent un savoir-faire � la fois verbal et
non
verbal, une connaissance pratique du code et des r�gles psychologiques,
sociologiques et culturelles qui permettront son emploi appropri� en
situation.
Elle s’acquiert en m�me temps que la comp�tence linguistique. Il ne
suffirait
donc pas de conna�tre les r�gles grammaticales de la langue �trang�re
pour
communiquer, il faudrait en plus conna�tre les r�gles d’emploi de cette
langue
(quelles formes linguistiques employer dans telle ou telle situation,
avec
telle ou telle personne, etc.). L’objectif est d’arriver � une
communication
efficace:
Les
tenants de l’approche communicative consid�rent qu’une communication
efficace
implique une adaptation des formes linguistiques � la situation de
communication (statut de l’interlocuteur, �ge, rang social, lieu
physique,
etc.) et � l’intention de communication (ou fonction langagi�re:
demander
d’identifier un objet, demander une permission, donner des ordres, etc.
De plus,
le
sens communiqu� n’est pas toujours totalement identique au message que
le
locuteur a voulu transmettre, car le sens est le produit de
l’interaction
sociale, de la n�gociation entre deux interlocuteurs. En effet, lorsque
l’on
produit un �nonc� rien ne garantit qu’il sera correctement
interpr�t� par
notre interlocuteur.
Selon l’approche
communicative, apprendre une langue ne consisterait pas, comme le
croyaient les
b�havioristes et la m�thode audio-orale, � cr�er des habitudes, des
r�flexes.
Pour les psychologues cognitivistes, l’apprentissage est un processus
beaucoup
plus cr�ateur, plus soumis � des influences internes qu’externes. C’est
pourquoi les exercices structuraux ont �t� critiqu�s car ils
provoquaient une
certaine lassitude chez les �l�ves et le professeur. On leur reprochait
d’�tre
purement m�caniques et de ne faire r�f�rence � aucune situation
concr�te. Alors
que pour l’approche communicative les constructions ne devraient jamais
fonctionner hors des �nonc�s naturels de communication.
L’apprentissage
n’est plus consid�r� comme passif, recevant des stimuli externes, sinon
comme
un processus actif qui se d�roule � l’int�rieur de l’individu et qui
est
susceptible d’�tre influenc� par cet individu. Le r�sultat d�pend du
type
d’information pr�sent� � l’apprenant et de la mani�re dont il va
traiter cette
information. L’enseignant devient ainsi “un conseiller”. Il doit
recourir � des
documents appel�s “authentiques”, c’est-�-dire non con�us exclusivement
pour
une classe de langue �trang�re.
L’approche
communicative pr�sente, au moins pour la compr�hension orale, diverses
formes
linguistiques destin�es � transmettre un m�me message. On prend en
compte le
niveau du discours et on distingue entre coh�sion (les relations
existant entre
deux �nonc�s) et coh�rence (les relations �tablies entre des �nonc�s et
la
situation extralinguistique). On utilise en classe de pr�f�rence la
langue
�trang�re, mais il est possible d’utiliser la langue maternelle et la
traduction. En ce qui concerne l’erreur, elle est consid�r�e
in�vitable.
Selon D. Coste,
l’acte de parole dans l’approche communicative est un outil d’analyse
encore
trop statique et manque de r�alit� psychologique. Les listes de
structures
morphosyntaxiques et de mots ont fait place aux listes d’actes de
parole et de
notions: on n’aurait alors pas d�pass� le stade de la
description-inventaire.
D. Coste critique le fonctionnalisme pur et dur parce qu’il vise un
public
id�al et des enseignants surdou�s, �voluant dans des situations
d’enseignement-apprentissage d�barrass�es des contraintes mat�rielles
et des
programmes scolaires classiques. Il estime que les apprenants en milieu
scolaire ne sont pas en mesure d’assumer leur �ducation et que les
enseignants
sont insuffisamment form�s pour appliquer correctement cette m�thode.
Cependant
l’approche
fonctionnelle a eu le m�rite de montrer qu’il n’est pas n�cessaire de
disposer
d’un bon cours pour r�aliser un bon enseignement, que l’apprenant
devait �tre
situ� au premier plan, que l’�crit devait r�cup�rer son statut et qu’il
n’est
pas n�cessaire de suivre un cours g�n�ral de langue pour atteindre un
objectif
sp�cifique. Rodriguez, Seara: L'�volution des
m�thodologies dans
l'enseignement du fran�ais
langue �trang�re depuis la m�thodologie traditionnel jusqu'� nos jours,
19 p. Dossier word
La perspective
actionnelle pr�n�e par le Cadre Europ�en Commun de R�f�rence "consid�re
avant tout l'usager et
l'apprenant d'une
langue comme des acteurs sociaux ayant � accomplir des
t�ches
(qui ne sont pas seulement langagi�res) dans des circonstances
et un
environnement donn�s, � l'int�rieur d'un domaine d'action
particulier. Si
les actes de paroles se r�alisent dans une activit� langagi�re,
celles-ci s'inscrivent elles-m�mes � l'int�rieur d'actions en
contexte
social qui seules leur donnent leur pleine signification".
(2000, chap.2.1., p.15 ). Ces quelques lignes du CECR renferment
la clef pour une nouvelle approche didactique passant d'une approche
communicative � une perspective actionnelle (AC - PA) afin de
surrmonter les difficult�s de communication rencontr�es par les
professionnels des langues vivantes (CECR, p. 9).
La t�che est � relier � la th�orie de l'approche actionnelle du cadre au sens de r�alisation de quelque chose, d'accomplissement en termes d'actions. Autrement dit, l'usage de la langue n'est pas dissoci� des actions accomplies par celui qui est � la fois locuteur et acteur social. Ceci peut aller du plus pragmatique (monter un meuble en suivant une notice) au plus conceptuel (�crire un livre, un argumentaire, emporter la d�cision dans une n�gociation). Dans cette perspective, la comp�tence linguistique peut �tre sollicit�e en totalit� (ex du livre), en partie (cas de la notice de montage), ou pas du tout (confectionner un plat de m�moire). La comp�tence linguistique est un type de comp�tence qui entre dans la r�alisation de t�ches.
On pourrait r�sumer, � ce stade, le cadre comme la somme de
niveaux de ma�trise de comp�tences (langagi�res ou non
langagi�res) entrant dans la r�alisation de t�ches.
Cette approche a des incidences sur les apprentissages et leur
conception car cela veut dire s�rier les activit�s langagi�res et les
croiser, hi�rarchiser les difficult�s et associer le dire au faire.
"De tous les dispositifs s’inscrivant dans le cadre g�n�ral d’une approche communicative, c’est l’apprentissage par t�ches qui cherche le plus r�solument � reproduire les conditions naturelles de la communication et � centrer la p�dagogie sur les activit�s de l’apprenant. Le principe d’une telle d�marche consiste � proposer comme �l�ment central la mise en place de t�ches communicatives dans une s�quence qui les approche progressivement en complexit� et en authenticit� de la communication en situation naturelle (Long & Crookes, 1992). D’apr�s une d�finition de Skehan (1998, 95), une t�che communicative comporte les caract�ristiques suivantes : le sens prime sur la forme ; il y a un probl�me de communication � r�soudre ; il existe un rapport avec des activit�s du monde r�el ; l’ach�vement de la t�che est prioritaire ; la t�che s’�value en termes du r�sultat. La mise en �uvre d’une t�che communicative entra�ne en g�n�ral, d’une part, la r�partition des apprenants en bin�mes ou en petits groupes et, d’autre part, la cr�ation d’un �cart d’informations entre diff�rents locuteurs (information gap), les apprenants ayant pour but de diminuer cet �cart par une activit� communicative en L2.
L’utilisation de t�ches comme outils p�dagogiques s’inspire largement de l’id�e qu’une communication authentique suffit pour d�clencher une dynamique d’acquisition. Selon les th�ses interactionnistes, une interaction asym�trique, telle qu’une communication exolingue, entra�ne une n�gociation des sens, caract�ris�e par des demandes de clarification, des contr�les de compr�hension, des auto- et h�t�roreformulations, qui g�n�re des processus plus ou moins implicites d’acquisition chez le locuteur faible en l’amenant � focaliser sur les formes langagi�res pour assurer sa participation dans la communication [3].
La position interactionniste semble pourtant valoir beaucoup moins pour le cas des t�ches communicatives en contexte scolaire, o� les �l�ves partagent une langue maternelle commune et poss�dent � peu pr�s le m�me niveau de comp�tences dans la langue cible. Des travaux ant�rieurs (Griggs, 2000, 2002 ; Nussbaum & al., 1999) montrent en effet que dans ces conditions les probl�mes d’intercompr�hension sont rares et que les t�ches communicatives g�n�rent donc peu de n�gociation des sens. En outre, les apprenants ont souvent tendance � privil�gier la communication � tout prix en mettant l’accent sur la fluidit� de la production aux d�pens de la correction linguistique et de la complexit� du discours. La cons�quence, traduite en termes du mod�le cognitif, est que les r�gles proc�durales qu’ils utilisent reposent trop sur la L1 et sur des structures lexicales m�moris�es ou construites ad hoc, au d�triment de la g�n�ration et de l’�volution de r�gles morpho-syntaxiques en L2, ceci provoquant une proc�duralisation pr�coce, et donc une fossilisation, de certaines structures idiosyncrasiques. Par ailleurs, comme les t�ches communicatives se r�alisent g�n�ralement entre apprenants sans l’intervention directe d’un enseignant, il manque souvent au cours des interactions un mod�le linguistique pouvant fournir l’input et le feedback textuels et grammaticaux n�cessaires pour ajuster les productions des locuteurs aux normes conventionnelles de la langue cible.
Il ne suffit donc pas de
communiquer dans une classe de langues pour apprendre une langue
�trang�re. Bien que les t�ches communicatives cr�ent des conditions
favorables, ce sont les conduites langagi�res que les apprenants
adoptent en les r�alisant qui constituent le facteur le plus
d�terminant pour leur apprentissage. D’apr�s une �tude d�j� cit�e
(Griggs, 2000, 2002), les interactions les plus fructueuses du point de
vue acquisitionnel se caract�risent par un taux �lev� d’activit�
m�talinguistique (auto- et h�t�roreformulations, recours � L1…)
destin�e non pas � l’intercompr�hension mais � un travail, effectu�
souvent en collaboration, de recherche de la forme conventionnelle de
la langue cible. Cela dit, l’enseignant a un r�le primordial � jouer
dans un dispositif d’apprentissage par t�ches. M�me s’il se tient �
l’�cart au cours de l’activit� communicative, il doit, lors d’une phase
pr�paratoire, mettre en place d’autres activit�s destin�es � g�n�rer
l’input n�cessaire pour alimenter les productions des �l�ves, et, lors
d’une phase d’�valuation, fournir un feedback permettant aux �l�ves de
prendre un recul m�talinguistique par rapport � leurs productions..."
W�rffel, Nicola (2006): Strategiengebrauch bei Aufgabenbearbeitungen in internetgest�tztem. T�bingen: Narr (Giessener Beitr�ge zur Fremdsprachendidaktik).
Bausch, Karl-R./Burwitz-Melzer, Eva/K�nigs, Frank G./Krumm, Hans-J. (Hrsg.) (2006): Aufgabenorientierung als Aufgabe. Arbeitspapiere der 26. Fr�hjahrskonferenz zur Erforschung des Fremdsprachenunterrichts. T�bingen: Narr (Giessener Beitr�ge zur Fremdsprachendidaktik).
P�dagogie diff�renci�e : tentative de r�ponse � l’h�t�rog�n�it� des classes par une adap-tation des d�marches, des supports, des aides, des modes d’�valuation, etc., aux besoins des apprenants ou groupes d’apprenants. (Voir I.O. pour les classes de col-l�ge, pp. 22-24.) (d’apr�s Y. Cossu, 1995)
La
pratique de la diff�renciation p�dagogique
consiste � organiser la classe de mani�re � permettre � chaque �l�ve
d'apprendre dans les conditions qui lui conviennent le mieux.
Diff�rencier la p�dagogie, c'est donc mettre en place dans une classe
ou dans une �cole des dispositifs de traitement des difficult�s des
�l�ves pour faciliter l'atteinte des objectifs de l'enseignement.
Existe-t-il des dispositifs diff�rents permettant d'atteindre un m�me
objectif p�dagogique, ou peut-on d�terminer des profils d'�l�ves �
qui certaines m�thodes conviennent mieux que d'autres?
Remarque importante : il ne s'agit donc pas de diff�rencier les
objectifs, mais de permettre � tous les �l�ves d'atteindre les m�mes
objectifs par des voies diff�rentes.
Pourquoi parler de
diff�renciation ?
La
transformation du syst�me
�ducatif,
en particulier du premier cycle de l'enseignement secondaire (cr�ation
des Coll�ges d'Enseignement Secondaire � trois fili�res en 1963, et du
coll�ge unique par Ren� Haby en 1976) a plac� les professeurs devant la
difficult� d'avoir � enseigner un m�me programme dans des classes
devenues tr�s h�t�rog�nes : diff�rences de niveau scolaire et d'origine
sociale, arriv�e au coll�ge d'�l�ves dont les parents n'avaient pas
fait d'�tudes secondaires et qui avaient donc plus de difficult�s �
rentrer dans le nouveau contrat, etc...
Des exp�rimentations tendant � g�rer ces
diff�rences on �t� conduites dans les classes au cours des ann�es 70,
impuls�es par l'Institut National de la Recherche P�dagogique et
par des mouvements p�dagogiques. En liaison avec ces innovations, une
r�flexion s'est d�velopp�e autour de l'id�e de diff�renciation
p�dagogique chez des auteurs qui �taient �galement les animateurs
de ces exp�rimentions, comme Louis Legrand (1), Andr� de Peretti (2) et
Philippe Meirieu (3).
Ce courant, repr�sentatif des pr�occupations p�dagogiques de l'�poque,
privil�giait l'acquisition de m�thodes par les �l�ves ; mais la prise
en compte des difficult�s li�es � l'apprentissage de contenus de
savoirs particuliers - le p�le "savoir" du triangle
didactique - s'est
peu � peu impos�e par la suite.
Alors que l'enseignement primaire assume depuis le si�cle dernier la
formation de l'ensemble de la population, la p�dagogie diff�renci�e
est apparue comme un moyen de faire face aux difficult�s des premiers
apprentissages. Dans le cadre de l'organisation en cycles de l'�cole
primaire, les dispositifs de diff�renciation doivent permettre aux
enseignants de g�rer des groupes classes dans lesquels certains �l�ves
n'ont pas atteint tous les objectifs du niveau consid�r�. On retrouve
donc au niveau d'une mesure institutionnelle des modalit�s
d'organisation du travail en classe traditionnellement mises en �uvre
depuis longtemps dans l'enseignement primaire.
Il convient de souligner que pour les auteurs de la p�dagogie
diff�renci�e,
la classe homog�ne est un mythe - le mythe identitaire selon de Peretti
-, puisque l'enseignant recr�e toujours de l'h�t�rog�n�it� � partir
d'un groupe homog�ne.
Qu'est-ce qu'un
dispositif de p�dagogie diff�renci�e ?
L'enseignant,
ou l'�quipe
d'enseignants :
Qu'en est-il des
diff�rences attribu�es aux �l�ves ?
La
question des diff�rences entre
�l�ves
est diversement appr�ci�e
selon les auteurs et les acteurs :
Remarques
:
D'un
point de vue pratique, le choix de cette grille d'analyse est
�videmment le point crucial : elle doit �tre � la fois pertinente �
l'objectif et suffisamment simple pour �tre g�rable.
D'un point de
vue th�orique, il est difficile d'y voir clair : au d�bat scientifique
s'ajoutent des consid�rations id�ologiques, certaines diff�rences ne
sont pas fond�es scientifiquement, d'autres sont vivement discut�es,
d'autres encore rel�vent de crit�res pragmatiques.
Comment adapter les
strat�gies aux "profils" des
�l�ves ?
En
faisant varier certaines
caract�ristiques du dispositif
p�dagogique :
Apr�s
de Peretti, beaucoup d'auteurs ont soulign� que la diff�renciation
n'�tait pas forc�ment simultan�e, mais qu'elle pouvait �galement �tre
successive : deux strat�gies sont propos�es successivement � la classe
pour deux t�ches analogues (5).
Soulignons pour terminer que la strat�gie choisie par l'enseignant peut
�tre conforme, ou contraire � celle que l'�l�ve privil�gierait
spontan�ment: cela d�pend de l'objectif que l'enseignant se fixe � un
moment donn�.
Peut-on conna�tre les
caract�ristiques des �l�ves ?
Les
ouvrages sur la diff�renciation proposent des questionnaires ou des
entretiens � mener avec les �l�ves sur leurs m�thodes de travail.
L'observation de leur comportement, l'analyse des questions qu'ils
posent, de leurs erreurs, des demandes d'aides qu'ils formulent,
constituent d'autres indices de leurs difficult�s. Les contraintes
temporelles qui p�sent sur l'enseignement et ce que nous avons dit
pr�c�demment des grilles d'analyse montrent les limites de ces
investigations, mais l'instauration de ce questionnement entre le
professeur et l'�l�ve sur les modalit�s d'acc�s au savoir peut �tre
tr�s utile.
En conclusion
"Projet"
appara�t au XV� si�cle. C'est un terme d�riv� du verbe "porjeter" qui
signifie en vieux Fran�ais "jet� dehors, au loin, en avant". De la
Renaissance � aujourd'hui quatre figures de la notion de projet se sont
succ�d�es (1).
La premi�re est celle du projet architectural, premi�re forme de
division du travail entre la conception et la r�alisation d'une �uvre.
Au XVIII� si�cle, le projet glisse de l'univers technique � l'univers
soci�tal. Pr�domine alors la figure du projet de soci�t�, port�e par la
philosophie des Lumi�res, la croyance en la science et le progr�s. Puis
s'impose au XIX� une troisi�me figure : le projet existentiel, concept
philosophique central de la ph�nom�nologie et de l'existentialisme. Le
projet d�finit l'intentionnalit� de l'homme, ce par quoi il va
instaurer une relation privil�gi�e avec son environnement et qui va
donner sens � son existence. Enfin, la derni�re figure est celle du
projet individualis�, qui occupe tous les secteurs depuis le milieu des
ann�es 70. Si l'on parle tant "projet" dans un contexte de crise, c'est
pour demander � l'individu d'orienter lui-m�me ses actions, dont la
soci�t� n'en produit plus le sens et n'en offre plus les cadres de
r�f�rence, en l'absence d'un projet soci�tal global.
Le projet est en
effet,
par d�finition :
Il
est repr�sentation et gestion de l'espace et du temps, rationalisation
et orientation de l'action. C'est un processus dynamique, moteur de
l'action, puisque par son projet l'individu vise non seulement une
situation future mais organise aussi tr�s concr�tement l'ensemble des
op�rations n�cessaires � l'av�nement de cette situation. C'est
�galement un processus ouvert parce que tant que l'action anticip�e
n'est pas factuelle, elle garde un caract�re r�versible. C'est l� un
des caract�res fondamentaux de tout projet. Un projet n'est pas un
carcan. Il n'est pas un cadre rigide et enfermant. Il n'est pas non
plus un contrat, une "convention par laquelle une ou plusieurs
personnes" s'obligent, envers une ou plusieurs autres, � donner, �
faire ou � ne pas faire quelque chose" (Code civil)" (Le petit
Robert). Il est le fil conducteur �volutif et mall�able � souhait d'une
histoire en devenir, un sc�nario possible parmi d'autres qui peuvent �
tout moment �tre privil�gi�s � la place du choix initial.
Avoir un projet suppose donc l'exploration d'un environnement ouvert.
Cela suppose que l'individu puisse agir sur son environnement, que ce
dernier ne soit pas enti�rement d�termin�. La notion de projet v�hicule
une conception optimiste et humaniste des rapports sociaux : elle
sous-entend l'existence d'un champ accessible de possibles.
Par ailleurs, la d�marche de projet est une d�marche globale et
singuli�re. Globale parce que le projet forme un tout coh�rent entre le
but vis� et la d�marche entreprise pour l'atteindre. Il englobe � la
fois l'�laboration, l'ex�cution, la gestion et l'�valuation de
l'action. Singuli�re parce qu'il propose une r�ponse sp�cifique � un
cas particulier.
Le projet dans
l'Education nationale
L'id�e
de l'�l�ve acteur de ses apprentissages n'est pas r�cente. Elle est
pr�sente d�s la premi�re moiti� du XX� si�cle dans les courants
p�dagogiques pr�nant les m�thodes actives, comme la p�dagogie ouverte
(Dewey) ou l'�ducation nouvelle (Freinet, Montessori, Decroly). L'id�e
de projet, elle, appara�t plus tard. Elle appara�t dans les textes
officiels au milieu des ann�es 70, � une p�riode marqu�e par la
p�dagogie par objectifs, centr�e sur
l'apprenant et la finalit� des apprentissages.
Le premier moment de la politique de projet a �t� l'instauration en
1973 des "10% p�dagogiques". Cette mise � disposition des
�tablissements secondaires d'un contingent horaire a �t� � l'origine de
nombreux projets p�dagogiques innovants, d'exp�rimentations dans les
classes et les �coles. Ont suivi en 1979 les projets d'action
culturelle et �ducative (PACTE), en 1981 les projets d'action
�ducative (PAE) et les projets de zones d'�ducation prioritaires
(ZEP), en 1989 le projet d'�tablissement et le projet
personnel de l'�l�ve...
La liste est longue. Tous les niveaux du syst�me �ducatif
sont concern�s : l'�l�ve dans sa trajectoire scolaire ; les enseignants
dans leur pratique p�dagogique ; le chef d'�tablissement et le
personnel non enseignant dans l'organisation et le fonctionnement de
l'�tablissement, dans la gestion du public accueilli ; les zones
d'�ducation prioritaires
et les bassins de formation dans la gestion du r�seau �ducatif...
Personne n'y �chappe. L'Education nationale de plus en plus confront�e
� des situations probl�matiques (�chec scolaire, orientations mal
v�cues, tensions...), comme la soci�t� globale, s'est mise � l'heure du
projet. Avec la loi d'orientation sur l'�ducation de 1989,
l'�l�ve est officiellement plac� au centre du syst�me �ducatif.
C'est l'aboutissement du
mouvement d'individualisation des scolarit�s et
l'institutionnalisation de la mise en projet des pratiques scolaires,
amorc�s dix ans plus t�t.
Si la notion de projet est omnipr�sente � l'Ecole, c'est parce qu'elle
joue un r�le essentiel : elle participe � la gestion institutionnelle
des dysfonctionnements. D'une part, elle permet de r�pondre au probl�me
de l'h�t�rog�n�it� du public scolaire qu'un m�me mouvement �ducatif ne
permet plus d'embrasser et de mobiliser. Il appartient d�sormais �
chacun de trouver sa place dans la formation. D'autre part, elle permet
d'apaiser les tensions �l�ve/institution en d�pla�ant le probl�me de
l'�chec scolaire et des orientations subies du syst�me vers l'individu.
En personnalisant les parcours, le projet renvoie la responsabilit� des
scolarit�s difficiles sur les �l�ves.
Avec le projet, l'Education nationale laisse au "terrain" l'initiative
de r�soudre les situations de crise, d'imaginer de nouveaux modes de
fonctionnement. Le projet est un outil central des politiques
�ducatives.
Il permet de d�l�guer mais aussi d'�valuer la mise en �uvre de ces
politiques. Cependant, pour �valuer les pratiques scolaires, encore
faut-il que les projets �labor�s soient de vrais projets. C'est-�-dire
qu'ils reposent sur des actions concr�tes, impuls�es par la volont�
d'un individu ou d'une �quipe, non des chartes fant�mes reprenant les
g�n�ralit�s des textes dans le seul but de satisfaire � la demande
institutionnelle.
Les projets de
l'univers
scolaire
Au-del�
la dimension concr�te des points abord�s, ce type de projet d�termine
la politique m�me de l'�cole ou de l'�tablissement : les orientations
prises en mati�re de notation, d'orientation, de lutte contre l'�chec
scolaire, d'apprentissage de la lecture, de gestion des actes de
violence, d'ouverture sur l'environnement... Poser des objectifs
et des axes de travail commun permet d'int�grer les activit�s de chacun
dans l'action collective, de dynamiser et mobiliser tout ou partie de
l'�quipe �ducative dans la vie de l'�tablissement. Ceci est un point
non n�gligeable. En effet, une �tude r�cente sur la violence en milieu
scolaire (3)
a montr� l'importance de la mobilisation et de la coh�sion interne de
l'�quipe �ducative dans la r�gulation des conflits. Or, le projet
d'�tablissement
peut �tre le moyen de faire �merger et de l�gitimer une image forte de
l'�tablissement, et de rassembler enseignants, personnel �ducatif et
�l�ves autour de cette identit�.
Se
projeter permet au jeune de se sentir impliqu� dans l'�volution de sa
carri�re scolaire, de "garder la face" (au sens goffmanien, 5)
dans une trajectoire sur laquelle les contraintes p�sent lourdement. Il
n'est plus seulement un �l�ve, le projet lui rend son statut de
personne. Cependant, la demande institutionnelle de projet est porteuse
de paradoxes et d'illusions. La demande m�me de projet aupr�s d'un
public en difficult� est une injonction paradoxale. En effet,
l'exp�rience scolaire de ces �l�ves est tellement sous tension qu'elle
ne rec�le "aucune des ressources du projet" (6).
En l'occurrence, la responsabilisation et l'autonomisation des choix
scolaire et professionnel, sous-jacentes � cette demande, fonctionnent
comme un miroir d�formant. La formulation d'un projet d'orientation
n'implique pas forc�ment une grande libert� de choix des possibles. Ce
n'est pas parce que le jeune a un "projet-op�ratoire" qu'il a un
"projet-existentiel". Au contraire m�me, le premier peut l�gitimer
l'absence du second, et faire oublier aux "outsiders" du syst�me que
les conditions de leur exp�rience ne permettent pas l'�mergence d'un
"projet-libert�".
L'utilisation
des PAE, malgr� l'id�e qui est � l'origine de leur cr�ation, peut
s'accompagner d'effets pervers. Comme le montre une �tude portant sur
le contenu de 430 projets "la nature des activit�s entreprises et les
objectifs poursuivis � travers les PAE varient sensiblement en fonction
de la composition du public scolaire" (8).
D'une mani�re g�n�rale en effet (mais non syst�matique) les activit�s
rattach�es au monde du travail, aux relations humaines, � la vie
quotidienne, les productions mat�rielles et intellectuelles sont
davantage pr�sentes dans les coll�ges dont le public est issu de milieu
modeste ou tr�s d�favoris�. Il semblerait que les actions mises en
place visent � pr�parer ces �l�ves � la r�alit� sociale qui les attend,
ou � "compl�ter" les connaissances transmises dans leur milieu. Les
activit�s artistiques elles, scolairement appr�ci�es, sont surtout
l'apanage des coll�ges dont le public est issu des classes ais�es.
L'auteur conclut ainsi � un maintien de la diff�renciation sociale
inter-�tablissements "dans le sens o� les savoirs et les savoir-faire
transmis dans le cadre des PAE n'ont pas la m�me valeur en termes de
culture l�gitime".
A
partir d'�tudes portant sur les
projets
et les actions men�s en ZEP, Rochex pose la question de
"l'extraordinaire du projet contre l'ordinaire de la classe" (10).
En effet, ces �tudes montrent la s�paration existant d'une part entre
les activit�s hors classe men�es dans le cadre du projet de zone
(jug�es motivantes) et celles men�es en classe (jug�es ennuyeuses), et
d'autre part entre les actions socialisantes et les apprentissages. Ces
dichotomies posent probl�me :
Rochex
met ainsi en �vidence le fait
qu'�
trop couper les activit�s
p�dagogiques du projet de zone des activit�s p�dagogiques de la classe,
l'on risque de s'�loigner de l'objectif premier : r�duire l'�chec
scolaire et am�liorer les conditions de scolarit� des enfants issus de
milieu d�favoris�.
Le nouveau plan de relance des ZEP fait �voluer le
projet de zone vers un contrat de r�ussite
qui "doit reposer sur un diagnostic de la situation et des r�sultats
obtenus, en identifiant les causes de r�ussite et d'�chec. Il
comportera des objectifs pr�cis et des engagements mutuels pour la
r�ussite des �l�ves" (9c).
Portant sur une p�riode de 1 � 4 ans, ce contrat engagera l'ensemble
des partenaires concern�s ainsi que le recteur de l'acad�mie. On aura
compris que ce contrat-l� n'est pas de m�me nature que le contrat
didactique : il prend l'id�e de contrat
dans le sens de ce terme en droit civil, tandis que le contrat
didactique fait r�f�rence au contrat social comme syst�me
d'attentes implicites que nul ne peut d�crire en entier.
Le passage d'une politique de projet � une politique de contrat, s'il a
ind�niablement des avantages, comporte aussi ses limites. Le contrat
de r�ussite
l�ve les ambiguit�s d'une utilisation "molle" du projet : le
faire-semblant d'une initiative pour se d�barrasser d'une "corv�e"
institutionnelle, la diffusion d'un discours d'autonomie qui masque la
r�alit� contrainte, le caract�re n�buleux des objectifs et du plan
d'action pour �chapper � une �valuation per�ue comme un contr�le...
Avec le contrat, les choses sont claires : les acteurs "s'engagent
mutuellement" � �uvrer pour une plus grande r�ussite des �l�ves. Or, un
individu qui signe un contrat se doit de respecter ses
engagements. Cette obligation morale et institutionnelle, l�galis�e,
permet moins facilement de renvoyer la responsabilit� sur les autres,
ou de s'en tenir � de simples intentions. Les actions projet�es
gagneront sans doute en r�alisme et en pertinence. De par sa nature et
son mode de fonctionnement, le contrat oblige � plus de pragmatisme
et de clart�. Pour autant, ce mode de fonctionnement n'est pas sans
faire question. En effet, le passage de la notion de projet � celle de
contrat implique de renoncer � l'un des caract�res fondamentaux et
essentiels du projet : le caract�re r�versible de l'action projet�e.
Or, avec le contrat les choses sont d�finies d�s le d�part : la marge
d'erreur et de libert� d'action risque de se r�duire comme peau de
chagrin.
Fin
des ann�es 80, Jean Vassillef a
d�velopp� une th�orie de la p�dagogie
du projet.
Il d�finit celle ci comme "une socio-p�dagogie, ce qui signifie que les
comp�tences comportementales s'y acqui�rent par le v�cu direct d'une
mise en situation r�elle. Dans cette optique
la formation n'est pas consid�r�e comme un lieu de pr�paration des
comp�tences pour leur mise en action ult�rieure (plus tard et ailleurs)
dans la r�alit� sociale, mais comme une institution sociale � part
enti�re, de m�me grandeur que les autres (c'est m�me l'une des plus
importantes), o� chaque v�cu prend la dimension imm�diate de la r�alit�
sociale" (13). Si l'on retrouve dans sa conception le
principe fondamental de la p�dagogie du projet,
Vassillef, fort de son exp�rience de formateur confront� � un public en
difficult�, va en faire une v�ritable p�dagogie de l'autonomie.
Cette approche est surtout pertinente avec les adolescents (notamment
ceux en �chec, en mal de projet ou dont l'exp�rience scolaire est
douloureuse), la capacit� � analyser son histoire et � se projeter
�tant insuffisantes chez les jeunes enfants. En effet, ici le projet ne
sert pas seulement les activit�s de la classe, il n'est pas non plus un
simple outil de l'orientation ou de l'insertion. Il est � la base de la
d�marche d'autonomie de la personne, l'autonomie �tant entendue comme
"vivre selon un projet existentiel authentique, en retirant dans le
pr�sent la satisfaction de r�aliser un projet d'anticipation personnel
b�ti sur les valeurs coh�rentes d'un d�sir dont on conna�t la gen�se"
(13).
Dans cette conception, la p�dagogie de
projet
consiste � articuler pass�-pr�sent-futur pour aider les individus en
formation � �laborer un projet motiv�, c'est-�-dire un projet
d'anticipation qui s'articule de fa�on logique avec le projet
existentiel ("ligne de conduite g�n�rale (que la personne) se
donne et � laquelle elle tendra � rapporter l'ensemble des actes de sa
vie" (13),
un projet personnel qui ne soit pas "d�charn�", mais qui s'enracine
dans l'histoire de l'individu et ait une signification profonde pour
lui.
Conclusion
Pour
des raisons historiques li�es au d�veloppement des disciplines
scientifiques, les rapports entre enseignement et apprentissage
scolaires sont trait�s diff�remment selon les courants th�oriques. Par
exemple lorsqu'on parle de th�ories de l'apprentissage, il est fait
r�f�rence g�n�ralement � des recherches psychologiques. Mais les
psychologues, qui ont �tudi� finement les processus individuels
d'apprentissage, ne peuvent pas dire grand chose, en tant que
psychologues, sur l'enseignement. On pourrait tenir des propos
analogues pour la sociologie de l'�ducation qui propose des
explications externes au processus d'enseignement-apprentissage.
Ce
n'est que r�cemment, notamment par le biais des Technologies de
l'Information et de la Communication, qu'un regain d'int�r�t pour l'apprentissage
par enseignement
� r�activer des probl�matiques d�j� anciennes en sciences sociales. De
m�me que la cr�ation des IUFM conduit � r�interroger les courants
th�oriques "classiques" pour les besoins de la formation des
enseignants. D'abord parce que pour certains d'entre eux il existe des
rapports �troits entre enseignement et apprentissage, tandis que pour
d'autres les deux processus peuvent �tre consid�r�s de mani�re quasi
ind�pendante. Ensuite, parce qu'on ne forme pas de la m�me mani�re les
futurs professeurs selon que l'on consid�re l'enseignement comme devant
suivre le d�veloppement psychologique des enfants et assister les
�l�ves dans leurs apprentissages, ou que l'on consid�re l'enseignement
comme ouvrant sur le d�veloppement de capacit�s ou de comp�tences
intellectuelles qui n�cessite l'apprentissage d'outils de pens�e
sp�cifiques. Enfin, parce que ces courants th�oriques n'�chappent pas
aux id�ologies et aux d�bats actuels sur les enjeux sociaux de l'�cole.
Diverses conceptions
de
l'apprentissage scolaire
En mati�re d'�ducation ou de formation, l'apprentissage peut �tre consid�r� :
On
notera que si ces deux courants dominants s'opposent sur le plan
th�orique ils se conjuguent cependant sur le plan id�ologique comme en
t�moignent les directives minist�rielles concernant l'individualisation
de l'enseignement. Le
seul courant th�orique qui ait propos� de consid�rer
l'enseignement-apprentissage comme un syst�me est l'approche historico-culturelle
qui souligne l'importance du processus de transmission de signes et
d'�uvres socialement �labor�s et du travail collectif dans
l'appropriation individuelle des savoirs.
Les courants
th�oriques,
leurs rapports �
l'enseignement et l'apprentissage scolaire
Le
behaviorisme (ou
comportementalisme en fran�ais)
consid�re l'apprentissage comme une modification durable du comportement
r�sultant d'un entra�nement particulier. Les m�canismes d'acquisition
se fondent sur les th�ories du conditionnement selon lesquelles
l'apprentissage consiste � �tablir une relation stable entre la r�ponse
que l'on souhaite obtenir et les stimulations de
l'environnement, � l'aide de renforcements
(positifs ou n�gatifs). Motivation, r�p�tition et renforcements
positifs de la bonne r�ponse sont les ingr�dients indispensables � tout
apprentissage. Pour obtenir le comportement
attendu, la mati�re � enseigner est d�coup�e en unit�s de comportement,
un programme de renforcements (1) doit �tre pr�vu pour orienter
l'action vers les
stimulus cibles (apprentissage discriminatif), les r�p�titions
permettent d'assurer l'association stimulus-r�ponse.
Le
behaviorisme
a particuli�rement insist� sur le d�lai entre la r�ponse fournie par
l'�l�ve et le renforcement en retour d�livr� par le professeur. De
nombreuses �tudes exp�rimentales ont pu montrer que plus ce d�lai �tait
bref, meilleure �tait la performance
finale. Par exemple, un d�lai de trois semaines pour rendre des copies
ne constitue pas de bonnes conditions pour que l'�l�ve r�organise son
action. Dans les pratiques courantes d'enseignement, cette id�e s'est
traduite sous la forme d'une �valuation imm�diate ou "en temps r�el"
selon le sc�nario suivant : expos� de la notion, exercice
d'entra�nement, �valuation de ce que les �l�ves ont retenu, de fa�on �
adapter la prochaine le�on aux r�sultats obtenus. Une des cons�quences
de ce type de pratique est la disparition "d'�crits longs", par
exemple, r�alis�s en classe ou � la maison.
Les
th�ses behavioristes se
sont
cristallis�es dans
l'enseignement programm� qui vise � installer un apprentissage sans
erreur en proposant une progression gradu�e des unit�s
comportementales. Les machines � enseigner (anc�tres des
ordinateurs) propos�es par Skinner sont suppos�es fournir un programme
de renforcements adapt� � chaque �l�ve (1). Elles
assureraient, mieux que ne peut le faire l'enseignant, une meilleure individualisation
de l'enseignement (2).
Pour
le b�haviorisme, l'apprentissage est le r�sultat de l'enseignement qui
doit fournir des formes adapt�es aux besoins des �l�ves. L'enseignement
doit parvenir � "un syst�me d'�ducation presque sans erreur" (2). La
qualit� de l'enseignement consiste � fournir aux �l�ves des situations
stimulantes, des renforcements adapt�s, des r�troactions correctrices
sous forme d'�valuation formative.
Cette derni�re consiste � mettre en place un programme d'entra�nement
qui assure l'atteinte par tous les �l�ves des objectifs prescrits.
Ainsi, le b�haviorisme fournit � l'enseignement des instruments comme
la p�dagogie de ma�trise et l'�valuation formative
pour assurer les apprentissages des �l�ves. L'apprentissage est d�fini
comme le temps requis pour atteindre un objectif pr�cis pour un niveau
de ma�trise d�termin� (voir par exemple l'organisation en cycles �
l'�cole �l�mentaire). La variable temporelle est essentielle dans
l'apprentissage. Par exemple, de nombreuses �tudes exp�rimentales ont
montr� qu'un entra�nement distribu� dans le temps produit un
meilleur apprentissage qu'un entra�nement mass�
(cours regroup�s, par exemple). Mais, visiblement, ce n'est pas sur de
tels r�sultats que se fonde la semestrialisation des formations �
l'universit�, par exemple.
Du point de vue de l'enseignement, la r�f�rence essentielle est celle
du pr�ceptorat (2)
puisque lui seul permet d'individualiser les parcours de formation, de
prendre en compte les difficult�s de chaque �l�ve. Id�es que l'on
retrouve dans les propositions minist�rielles relatives � l'aide
individualis�e, aux parcours diversifi�s, aux technologies de
l'information et de la communication �ducatives (T.I.C.E.). Cette
perspective, essentiellement pragmatique, �vacue notamment le rapport
au savoir,
les difficult�s conceptuelles des mati�res d'enseignement, le rapport
aux autres, l'analyse du travail du professeur, et la question des
rythmes scolaires ne prend pas en compte les rythmes d'apprentissage
des �l�ves puisque celui-ci est confondu avec le temps
d'enseignement.
Le
constructivisme,
consid�re l'apprentissage comme un processus de construction des
connaissances qui se r�alise dans l'interaction entre le sujet pensant
et l'environnement dans lequel il �volue. Ces th�ses accordent un r�le
essentiel aux actions et aux op�rations r�alis�es par le sujet dans la
structuration de la pens�e. Pour
construire ses connaissances, l'individu utilise les connaissances
ant�rieures comme moyen de repr�sentation, de calcul et de r�flexion
sur sa propre action. Les connaissances anciennes jouant le r�le de
processus d'assimilation des connaissances nouvelles (3). En d'autres
termes, ce qu'un individu va
apprendre d�pend de ce qu'il sait d�j�.
Les
th�ses constructivistes proposent un mod�le universel (syst�me de
r�gulation propre aux syst�mes vivants) du d�veloppement individuel de
l'intelligence, consid�r�e comme une forme particuli�re d'adaptation.
Elles proposent ainsi un mod�le du d�veloppement intellectuel
unidirectionnel et autonome ; c'est � dire interne au sujet et dont
l'�volution est ind�pendante de l'environnement (culturel, �ducatif,
etc.) et, a fortiori, de l'enseignement.
Cette approche a
�t� largement reprise par les discours p�dagogiques et les instructions
officielles. Elle fournit la rationalit� qui fonde les m�thodes
d'�ducation actives
dont les pionniers (Clapar�de, Decroly, Dewey) avaient soulign�
l'importance de l'action propre de l'�l�ve et d'une p�dagogie centr�e
sur la d�couverte et l'int�r�t. Dans cette approche pu�rocentrique, le
r�le du professeur consiste � proposer un environnement structur� et
riche pour que l'�l�ve d�couvre par lui-m�me les contradictions qu'il
est pr�t � affronter en inventant de nouvelles structures
intellectuelles. Cette tendance est particuli�rement marqu�e dans
l'enseignement scientifique (voir les micromondes informatiques
propos�s par Papert ou "la main � la p�te" propos�e plus r�cemment par
Charpack).
Ce que l'on retient g�n�ralement du constructivisme, dans sa forme
vulgaris�e, c'est :
Dans
cette perspective, le r�le de l'enseignant consiste surtout � ne pas
entraver le processus de d�veloppement interne de l'�l�ve en imposant
un programme d'enseignement (l'enseignement doit s'adapter aux besoins
des �l�ves). Son r�le consiste � observer, � diagnostiquer, � pratiquer
l'�valuation formative et la p�dagogie diff�renci�e.
Les pratiques de "l'enseignant-m�diateur" qui tendent � se r�pandre
actuellement m�lent des ingr�dients behavioristes � la "sauce"
constructiviste. Aussi convient-il dans les d�bats de bien distinguer
les r�sultats de la recherche scientifique, d'un c�t�, les doctrines
p�dagogiques et les r�formes minist�rielles, d'un autre c�t�.
Ces deux courants th�oriques privil�gient essentiellement "l'apprenant"
: le behaviorisme
se centre sur les conditions et les m�canismes par lesquels un �l�ve
parvient � fournir la r�ponse attendue dans des conditions bien
pr�cises ; le constructivisme piag�tien s'int�resse essentiellement �
la modification de processus internes de l'�l�ve. Mais l'un comme
l'autre ignorent les conditions r�elles du travail scolaire qui mettent
en pr�sence un enseignant, des �l�ves, un savoir et les contraintes de
mise en �uvre et de gestion d'une situation didactique
: �pist�mologiques, communicationnelles, temporelles, sociales, etc. En
somme, ces deux courants th�oriques, qui inspirent bien des r�formes,
des programmes scolaires et des doctrines p�dagogiques, ne parviennent
pas compl�tement � rendre compte des rapports entre enseignement et
apprentissage.
Le
cognitivisme est
un
courant th�orique qui n'�tudie pas l'apprentissage stricto sensu ou la
construction de connaissances. Il tente de rendre compte de la
mobilisation de connaissances acquises dans la r�solution de probl�mes.
Les notions centrales de repr�sentation de connaissances et de strat�gies
de traitement de l'information
sont souvent �voqu�es pour rendre compte des difficult�s des �l�ves
dans la lecture d'�nonc�s, la compr�hension de consignes, le traitement
de l'information, etc. Ces difficult�s, consid�r�es comme pr�alables �
l'apprentissage sont alors imput�es � l'�l�ve, elles sont � l'origine d'erreurs
ou d'obstacles � l'apprentissage, mais ne sont pas consid�r�es comme
des �l�ments constitutifs du processus d'enseignement ou
d'apprentissage. D'inspiration mentaliste, cette perspective renforce
les conceptions du constructivisme vulgaris� qui privil�gie les th�ses
internalistes du fonctionnement cognitif et individualistes de la
formation.
L'approche
historico-culturelle
propos�e par Vygotski est le seul courant th�orique qui se soit donn�
pour objet d'�tude les rapports entre l'enseignement et le
d�veloppement intellectuel m�diatis�s par un apprentissage
"instrumental" (4). La th�se essentielle pourrait �tre r�sum�e de
la fa�on suivante : l'enseignement est un processus de
transmission culturelle qui engendre le d�veloppement de
capacit�s mentales, non encore ma�tris�es par les �l�ves, et qu'ils
construisent par un apprentissage
d'outils sp�cifiques constitutifs des �uvres humaines (litt�raires,
scientifiques, artistiques…). La transmission culturelle de ces
derni�res �tant largement d�volue � l'�cole.
Selon
Vygotski, les savoirs enseign�s (les "concepts scientifiques") se
distinguent des conceptions famili�res (les "concepts quotidiens")
construites � travers l'exp�rience pratique. Les premiers sont des
produits de l'activit� humaine, des "�uvres" -litt�raires,
scientifiques, artistiques…- socialement �labor�es, historiquement
dat�es et culturellement transmises, notamment par l'�cole. Il ne
s'agit pas d'opposer les deux types de concepts, mais de diff�rencier
leur mode de transmission et d'appropriation.
L'�cole transmet des
savoirs constitu�s (linguistiques, math�matiques, biologiques…), des
savoirs "�crits" qu'elle transmet sous diff�rentes formes d'�critures
(diff�rents types de textes, symboles, plans, cartes, tableaux…). Ce
qui engendre � la fois une difficult� particuli�re dans l'acquisition
et un changement dans le rapport de l'�l�ve au monde. Pour conna�tre le
monde l'�l�ve n'agit pas directement sur la r�alit� physique qui
l'entoure, il agit par l'interm�diaire de ces diff�rents modes de
repr�sentation sur une partie de monde reconfigur�e � cette fin. Le
rapport au temps ou � l'espace, par exemple, ne peut se concevoir
ind�pendamment des outils qui seront utilis�s pour l'appr�cier
(sablier, calendrier, montre, syst�me m�trique…). L'�cole transmet des
"outils" qui assurent une fonction de m�diation entre l'�l�ve
et le monde, les autres et soi.
La th�se vygotskienne avance que le psychisme humain est de nature
sociale et que les fonctions intellectuelles se d�veloppent par
l'apprentissage de ces "outils" ou de "syst�mes de signes", au premier
rang desquels figure le langage (4).
Cette approche historico-culturelle (ou socio-historique, selon les
auteurs) se distingue, d'un c�t�, du r�ductionnisme behavioriste, de
son "imm�diatet�" et de son "pragmatisme", et, d'un autre c�t�, du
constructivisme piag�tien, dont elle refuse les explications
"internalistes". La transmission culturelle scolaire est � la fois la
source de la formation intellectuelle et de la socialisation. C'est
pour rendre compte de ce processus que cette approche �tudie les
activit�s s�miotiques et les processus de m�diation dans les
situations d'enseignement-apprentissage.
La transmission scolaire de tels savoirs se distingue des pratiques
sociales courantes (familiales, formation sur le tas). C'est la raison
pour laquelle l'�cole propose des situations dites "artificielles" par
opposition � des situations qui seraient "naturelles". Pour
ce faire, les rapports sociaux doivent �tre repens�s dans une
perspective d'�ducation formelle. B. Lahire parle de "p�dagogisation
des relations sociales" (5),
pour d�signer non seulement les rapports scolaires entre les ma�tres et
les �l�ves, notamment l'asym�trie de la relation ma�tre-�l�ve, mais
aussi les formes du dialogue didactique, qui se distinguent de formes
langagi�res famili�res. Ce cadre d'�change est aussi une fa�on de
penser son rapport au savoir
et aux autres. C'est dans ce cadre que l'on peut situer l'action du
professeur et des �l�ves au sein d'un collectif de travail ou groupe-classe.
Le travail de l'enseignant consiste � organiser un milieu d'�tude pour
un collectif d'�l�ves. Il organise non seulement l'environnement
technique et symbolique de construction d'une r�ponse collective, mais
il organise aussi les conditions du dialogue didactique :
professeur/collectif, explicitations, confrontations de points de vue
entre �l�ves, re-formulation, r�inscription de connaissances anciennes,
etc. C'est le d�roulement du dialogue didactique,
le d�veloppement discursif qui permet l'accomplissement du travail
r�flexif sur l'action, l'analyse critique, la prise de distance et de
conscience de ce que l'on fait et des raisons pour lesquelles on fait
ainsi et pas autrement. C'est une technique d'enseignement qui dispose
les �l�ves pour �tudier un objet de savoir particulier et les enr�le
dans un processus participatif.
Le processus
d'enseignement inscrit l'apprentissage dans le temps ; ce qui signifie
tr�s pr�cis�ment que le traitement fait des connaissances actuelles a
certes un sens par rapport � leur pass�, mais doivent en avoir par
rapport � leur devenir. C'est dire que la progression scolaire suppose
la transformation permanente d'une m�moire en pens�e agissante, la
construction progressive d'instruments de contr�le, de mobilisations
particuli�res, ce que Vygotski nomme les fonctions psychiques
sup�rieures
(attention, m�moire, volont�, pens�e verbale,...). En proposant des
situations d'�tude distribu�es dans le temps, le professeur est
contraint de "g�rer" � la fois la "continuit�" des apprentissages et
leur "rupture" pour entra�ner l'�l�ve au-del� de ce qu'il sait faire.
Il est ainsi amen� � cr�er une zone de proche d�veloppement.
Ce
paradoxe, continuit�/rupture, est caract�ristique du processus
transmission-appropriation qui doit transformer les contraintes
d'action en ressources cognitives qu'utilise le groupe-classe.
Par exemple, dans la classe l'�l�ve construit une r�ponse raisonn�e (il
doit rendre compte de son action dans les termes d'un syst�me
s�miotique (grammaire, alg�bre…) valid� par d'autres que lui-m�me (la
soci�t�, la grammaire "officielle", l'alg�bre enseign�…) et socialement
acceptable par le groupe-classe.
Ainsi, pour dire publiquement "comment et avec quoi" il pense, l'�l�ve
doit utiliser des "outils de pens�e" �labor�s par les g�n�rations
pr�c�dentes, et ces significations sociales font l'objet
d'�changes et de partage. La contrainte "rendre public l'utilisation de
significations sociales" constitue une ressource cognitive pour l'�l�ve
et le groupe. C'est pour cela qu'il doit d'abord raisonner avec les
autres (professeur et �l�ves) pour penser pour lui-m�me et par
lui-m�me. C'est le passage de l'interpsychique � l'intrapsychique
sur lequel le socioconstructivisme a particuli�rement
insist�.
Le processus de
transmission-appropriation de savoirs