Centration sur l’apprenant / enseignement axé sur l'apprenant: : méthodologie qui centre le projet éducatif sur l’apprenant et non sur le contenu ou la méthode. « L’essentiel de l’attention est porté sur « à qui enseigner ? », pour mieux adapter les moyens choisis («comment enseigner ? ») aux buts visés. » Elle tient compte des stratégies d’apprentissage qui peuvent différer d’un individu à l’autre. (R. Galisson, D’hier à aujourd’hui la didac-tique générale des langues étrangères Paris, CLE International, 1980). (d’après Y. Cossu, 1995)
La centration sur l'apprenant est issue du mouvement constructiviste. Elle apparaît dans les années 80, et va à l'encontre de la grammaire universelle de Chomsky. Pour comprendre ce qu'elle implique, il nous faut se pencher sur les idées de ses précurseurs.
Pour John Dewey, il faut susciter chez l'apprenant un engagement de celui-ci dans son propre apprentissage. Pour cela, l'enseignant doit être à l'écoute des intérêts de l'apprenant afin de constituer un plan de travail. L'apprentissage découlera donc des activités qui ont du sens pour l'apprenant. John Dewey croit en une pédagogie articulée par les maîtres mots suivants : activité, expérience, situation et interaction. Cette pédagogie consilie les conditions subjectives venant de l'apprenant et les conditions objectives venant de l'enseignant.
Edouard Claparede va dans le sens de John Dewey puisqu'il considère, lui aussi, que c'est du besoin et de l'intérêt de l'apprenant que découlent les activités favorisant l'apprentissage. Tout doit être présenté comme un jeu puisque celui-ci a une fonction pédagogique. Pour Edouard Claparede, le mot "apprendre" c'est exercer son intelligence et acquérir des méthodes de pensée. Il met l'accent sur le fait qu'apprendre n'est pas synonyme d'accumulation de connaissances mais bien l'exercise de l'intelligence de l'apprenant et l'acquisition de méthodes de pensée. L'enseignant a donc le rôle d'éveiller chez l'enfant des désirs, comme celui de résoudre un problème.
Roger Cousinet, il veut rendre une place active à l'apprenant : il pense qu'il faut s'abstenir d'enseigner puisqu'apprendre serait plus efficace. En effet, lorsqu'on est enseigné, on reçoit l'information alors que si on apprend, on va chercher celle-ci. L'enseignant doit proposer à l'apprenant des méthodes d'apprentissage. Roger Cousinet est partisan d'une pédagogie de découverte qui met l'accent sur l'acquisition des moyens d'apprendre.
Célestin Freinet développe l'idée de trois principes de bases implicant l'expression libre, le tâtonnement expérimental et la coopération. Ainsi l'apprenant construit son savoir seul ou en groupe dans une pédagogie de travail.
CENTRATION SUR L'APPRENANT
Notions clés abordées dans cet article : Approche communicative, Autonomie de l'apprenant, Cognitif/metacognitif, Evaluation formative, Pédagogie du projet, Simulations globales, Styles et stratégies d'apprentissage .
Remarque préalable : La centration sur l'apprenant ne désigne pas une méthode ou une approche pédagogique mais un concept régissant des types de procédure d'enseignement. Il est de ce fait commun et adaptable à plusieurs pédagogies.
Par opposition au terme "élève" dans la relation traditionnelle maître-élève, ce terme s'inscrit sur une démarche centrée sur le sujet de l'apprentissage. Le participe présent de "apprenant" tente de rendre la valeur d'actant souhaité par les partisans d'une pédagogie heuristique. L'apprenant est acteur et actif dans son propre apprentissage. On met aussi l'accent sur le cognitif et l'affectif du sujet.
Logique de l'enseignement Logique de l'apprentissage enseigner
permettre un apprentissage autonome former aux méthodes d’apprentissage laisser les élèves mettre en œuvre leurs propres stratégies individuelles d’apprentissage prendre en compte les exigences institutionnelles se centrer sur l’apprenant intervenir activement auprès des plus faibles en les sollicitant et en leur fournissant les moyens de progresser à partir de leur niveau permettre aux plus forts d’utiliser au maximum leurs capacités d’apprentissage maintenir les conditions d'un enseignement collectif en assurant une progression collective a priori permettre l'individualisation des apprentissages
Cette notion est mise en place dans les méthodes d' "autonomisation de l'apprenant" : notamment l'approche communicative, la méthode directe, la méthode naturelle.
Contrairement à ce que l'on avance souvent, la centration sur l'apprenant n'est pas synonyme de "mort du métier de professeur". Par contre elle passe par une refonte de son statut, de ses techniques et des objectifs d'enseignement.
Le temps nécessaire à sa mise en place implique un
changement des habitudes de travail important, tant du
côté des élèves que du côté des
enseignants. Si le changement des méthodes est facile à
imposer, celui des attitudes dificilement envisageable à cours
terme.
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La nouvelle "star" de cette approche a vu son statut grandement modifié. Là ou il n'était que figurant, il devient tête d'affiche, responsable de son apprentissage. On prend en compte ses besoins, ses interêts, ses styles d'apprentissage, ses stratégies, ses problèmes psychologiques : tout est fait pour optimiser ses chances de succès. Ici comme dans le cas de l'enseignant, les rôles qui incombent à l'apprenant varient grandement selon les auteurs, les méthodes et les approches.
L'apprenant
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L'enseignant
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Les savoirs (leur importance s'amoindrit) |
A lui de de chercher
les informations nécessaires à sa formation, à la
réalisation de son projet.
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Plutôt que de
fournir et d'exploiter les documents, il apprend où les trouver,
comment les choisir, les lire, les exploiter.
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Les savoir-faire (deviennent la partie la plus importante) |
Doit comprendre que
l'important est d'apprendre à apprendre : se
connaitre en tant qu'apprenannt (son style, ses stratégies) ,
être attentif aux stratégies d'apprentissage des autres,
chercher à en acquérir, à les partager.
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Repérer les
styles et les stratégies d'apprentissage des apprenants.
Proposer des activités permettant de les travailler, d'en
acquérir de nouvelles.
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Les savoir-être* |
Savoir collaborer, partager, transmettre les savoirs et savoir-faire. Au sein de la classe, le schéma interactif dominant n'est plus "question du prof-réponse de l'élève-retour du prof" mais "élève-élève", etc... |
Il n'est plus "au
centre" de l'espace classe. Il encourage les apprenants à
collaborer.
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*Il convient de faire la différence entre "le savoir-être" en tant que capacité et en tant que compétence. Dans ce dernier cas, il s'agit de l'ensemble des connaissances culturelles et sociales permettant à l'apprenant d'adapter son comportement aux us et coutûmes. Par ex : " On fait combien de bises déjà en Bretagne?"
On voit bien que la centration n'est pas tant sur l'apprenant que sur l'apprentissage, le niveau métacognitif. Il ne s'agit plus d'apprendre des savoirs, mais d'apprendre à apprendre.
Responsabiliser l'apprenant, c'est aussi le meilleur moyen de se prémunir de problèmes de discipline. La pédagogie par objectif s'assure de la complicité de l'apprenant et libère partiellement l'enseignant de son rôle "houspilleur-motivateur" ("nagging" en anglais). Dans la mesure où l'apprenant fait ses choix, et contribue à l'élaboration du contrat didactique, il n'est pas victime des choix arbitraires de l'enseignant.
En contexte scolaire, cette démarche est aussi civique : elle aide l'enfant ou l'adolescent à lui faire prendre conscience de ce méchanisme social essentiel.
Enfin, l'apprenant est actif, ce qui est suceptible de convenir à des publics difficiles à garder statique (enfants, adolescents, professionnels habitués à travailler en mouvement, etc.) mais aussi à des apprenants dont la passiveté constitue un obstacle.
S'il est vrai que les études sur la psycholgie de l'apprenant ont connu un formidable développement, on peut se demander si le but est véritablement altruiste. En effet, la centration sur l'apprenant est aussi le meilleur moyen de rentabiliser le système scolaire. Dans une société ou les élèves en échec considèrent attenter un procès à leur établissement, est-ce que responsabiliser les apprenants n'est pas une façon de se prémunir de ce genre de comportements ?
De la même façon, l'introduction d'outils technologiques dans la salle de classe relève-t-elle d'un véritable besoin de la part des acteurs du monde la formation ou d'une stratégie commerciale de la part des fabriquants pour s'ouvrir de nouveaux marchés ?